Attaques en Mer Rouge perturbent le trafic maritime et font grimper les prix du pétrole et de l’or
Les attaques menées par le groupe houthi dans la Mer Rouge et les frappes réalisées par les États-Unis et la Grande-Bretagne contre les cibles de ce groupe ont semé la confusion dans le mouvement des navires de transport et ont fait monter les prix du pétrole et de l'or, tout en affectant les revenus du Canal de Suez.
Les compagnies de fret changent de cap
Selon les données de transport de la Bourse de Londres et de la plateforme de données commerciales Kepler, au moins quatre pétroliers ont dévié leur route de la Mer Rouge depuis les attaques menées par les États-Unis et la Grande-Bretagne contre les cibles houthies au Yémen, en raison de la crainte croissante d'une extension des tensions.
Les Houthis ciblent les navires commerciaux depuis la fin de l'année dernière avec des attaques qu'ils disent viser à soutenir les Palestiniens face à la guerre menée par Israël sur la bande de Gaza. Les attaques se sont concentrées sur la zone du détroit de Bab-el-Mandeb.
En signe supplémentaire d'escalade, l'Iran a saisi jeudi un tanker transportant du pétrole brut irakien en direction de la Turquie. Cet incident s'est produit près du détroit d'Ormuz, un autre passage maritime vital pour le commerce mondial.
Les tankers Toya, Diana-A et Stolt Zulu, ainsi que le Navigate Pride LHJH, ont été observés effectuant un demi-tour en plein trajet pour éviter la Mer Rouge vendredi, selon les données de suivi des navires.
Les données ont montré que le tanker Toya, un supertanker capable de transporter jusqu'à deux millions de barils de pétrole, était vide. Quant aux trois autres navires, il s'agissait de tankers de carburant.
Plusieurs compagnies de transport ont déjà choisi d'éviter la région de la Mer Rouge ces dernières semaines en raison des risques accrus.
La compagnie danoise de transport maritime Torm a annoncé vendredi avoir décidé de suspendre temporairement toutes les opérations de navigation dans le sud de la Mer Rouge.
De son côté, la compagnie de fret Hafnia a déclaré vendredi avoir pris la décision de stopper immédiatement tous les navires se dirigeant vers le détroit de Bab-el-Mandeb ou à proximité.
Dans un communiqué, Hafnia a indiqué que la décision a été prise suite aux conseils des forces maritimes conjointes après les frappes aériennes américano-britanniques contre les Houthis au Yémen.
Suivant leur exemple, la compagnie de transport maritime Stena Bulk a informé l'agence Reuters qu'elle avait suspendu les traversées dans la Mer Rouge tôt vendredi.
Accueil prudent
Les grandes compagnies de transport Maersk et Hapag-Lloyd ont salué les mesures visant à sécuriser la région, bien que les entreprises n'aient pas précisé si les frappes américaines et britanniques seraient suffisantes pour le retour à la normale des opérations de navigation menant au Canal de Suez, qui est la voie la plus rapide entre l'Asie et l'Europe et par laquelle passe environ 12% des transporteurs de conteneurs mondiaux.
La compagnie maritime allemande Hapag-Lloyd a indiqué que les attaques menées par les Houthis contre les navires dans la Mer Rouge lui avaient coûté des frais supplémentaires mensuels estimés à plusieurs dizaines de millions de dollars.
Un porte-parole de la compagnie a souligné que les attaques "affectent toute l'industrie et nous aussi de manière significative". Il n'a pas évalué les frappes militaires internationales, mais a déclaré : "Nous saluons toute mesure qui rend le passage à travers la Mer Rouge de nouveau sûr".
Reuters a rapporté que l'Association des transporteurs de pétrole INTERTANKO a distribué un mémo à ses membres où elle indique que les forces maritimes conjointes conseillent à tous les navires "de se maintenir à une distance considérable de Bab-el-Mandeb".
INTERTANKO a ajouté qu'"on s'attend à ce que la période de menace pour les opérations de transport dure plusieurs jours". Environ 10% du commerce mondial passe par la Mer Rouge.
Les marchés pétroliers en pleine tempête
Les prix du pétrole ont bondi de 4% avec la réorientation des pétroliers hors de la Mer Rouge suite aux frappes aériennes et maritimes menées par les États-Unis et la Grande-Bretagne contre les cibles houthies au Yémen en réaction aux attaques de ce groupe depuis la fin de l'année dernière.
Les prix du pétrole ont grimpé de plus de 4%, et le prix du Brent a dépassé les 80 dollars suite aux risques géopolitiques élevés avant de redescendre à environ 78,3 dollars.
Le prix du brut West Texas Intermediate a aussi augmenté de 4% à plus de 75 dollars, avant de reculer et de se stabiliser près de 73 dollars en fin de journée.
Selon les analystes d'ING, plus de 20 millions de barils de pétrole sont acheminés quotidiennement à travers le détroit d'Ormuz, ce qui représente environ 20% de la consommation mondiale.
L'or profite de la situation
Les prix de l'or ont augmenté vendredi en raison des frappes aériennes sur le Yémen, ce qui a renforcé l'attrait du métal précieux en tant que refuge sûr.
Vers 20h33 GMT vendredi, l'or a progressé de 0,9% dans les transactions immédiates à 2046,62 dollars l'once.
Les contrats à terme américains sur l'or ont également augmenté d'environ 2% à 2050,90 dollars.
Kelvin Wong, analyste principal des marchés pour la région Asie-Pacifique de la compagnie OANDA, a indiqué que l'attention se concentrerait sur l'escalade de la tension géopolitique, qui, selon lui, "soutient les prix de l'or au-dessus de la moyenne mobile de 50 jours à 2015 dollars".
Le Canal de Suez en difficulté
Le président de l'Autorité du Canal de Suez, Osama Rabie, a déclaré que les revenus du canal en dollars ont diminué de 40% depuis le début de l'année par rapport à 2023, après que les attaques des Houthis au Yémen contre les navires en direction d'Israël ont provoqué un changement de cap dans leur itinéraire, loin de cette voie.
Rabie a mentionné dans une émission télévisée que le trafic de transit des navires avait chuté de 30% entre le 1er janvier et le 11 du même mois sur une base annuelle.
Il a précisé que le nombre de navires traversant le Canal de Suez est tombé à 544 cette année jusqu'à présent, contre 777 navires durant la même période l'année dernière.