Nouvelle avancée vers une pilule contraceptive non hormonale pour hommes
Depuis des décennies, la recherche sur une méthode de contraception masculine réversible, efficace et sûre avance lentement. Les raisons de ce retard sont aussi bien sociétales que biologiques, car la fertilité masculine diffère notablement de celle des femmes. Une étude récente publiée dans la revue Science le 23 mai 2024 pourrait marquer un tournant décisif dans cette quête.
Inactiver un gène pour stopper la production de gamètes
La contraception hormonale masculine présente des effets secondaires importants, notamment la réduction ou la suppression de la production de testostérone, ce qui a des conséquences notables sur l’efficacité de la méthode et requiert un long délai avant son effet. En conséquence, l’approche mécanique, intervenant sur la mobilité des spermatozoïdes ou leur viabilité, est de plus en plus explorée.
Dans cette étude, les chercheurs ont cherché à identifier une molécule capable d’inhiber la sérine/thréonine kinase 33 (STK33), une protéine cruciale pour la fertilité des hommes et des souris. Comme l’explique le Dr Martin Matzuk, chef de l’équipe de recherche : « Nous nous sommes concentrés sur une nouvelle approche : identifier une petite molécule qui inhiberait la sérine/thréonine kinase 33 (STK33), une protéine spécifiquement nécessaire à la fertilité chez les hommes et les souris. »
Résultats prometteurs sur les souris
Les expériences menées par l’équipe ont montré que l’inactivation du gène responsable de la production de STK33 rendait les souris mâles stériles, leurs spermatozoïdes étant anormaux, non viables, et dotés d’une mauvaise motilité. Le lien avec les hommes a également été établi : les mutations sur le gène responsable de STK33 chez les hommes provoquent une asthénozoospermie, une condition marquée par une mobilité réduite ou absente des spermatozoïdes, ainsi que des anomalies au niveau des flagelles.
Une difficulté majeure
Le Dr Matzuk souligne toutefois un défi clé : bien que STK33 soit une cible viable avec des problèmes de sécurité minimes, aucun inhibiteur spécifique n’a encore été trouvé capable de perturber efficacement la fonction de STK33 chez les organismes vivants. L’objectif est donc de trouver un inhibiteur sélectif opérant uniquement sur le gène de STK33.
Les chercheurs ont fait un pas en avant en découvrant des inhibiteurs potentiels, dont le composé CDD-2807, testé sur des souris. Le composé a franchi la barrière hémato-testiculaire, réduisant la motilité et le nombre de spermatozoïdes sans toxicité ni accumulation du produit dans le cerveau, et sans modification de la taille des testicules.
Vers une contraception réversible
Un des atouts majeurs du composé CDD-2807 est son caractère réversible : après une période sans injection, les souris ont récupéré une motilité et un nombre de spermatozoïdes normaux, redevenant fertiles. Ces résultats prometteurs positionnent le CDD-2807 comme une cible contraceptive de choix.
D’ailleurs, l’équipe préconise davantage de tests, d’abord sur des primates puis sur des humains, pour confirmer son efficacité et son innocuité à grande échelle. En attendant que ces recherches aboutissent, la vasectomie reste la méthode de contraception masculine la plus efficace.
Conclusion
Alors que la quête pour une pilule contraceptive masculine non hormonale progresse, cette étude publiée dans la revue Science apporte un nouvel espoir. Les recherches autour du composé CDD-2807 et de l’inhibition du gène STK33 pourraient révolutionner la contraception masculine, offrant une alternative sûre, réversible et surtout sans hormone. Reste à voir comment ces découvertes se traduiront dans les essais cliniques sur les humains.