Silicon Valley suit l’Europe dans la régulation de l’IA
La Californie, berceau de la Silicon Valley où de nombreuses entreprises technologiques sont installées, tente d’imposer des restrictions sur l’intelligence artificielle, inspirée par les normes réglementaires européennes, selon l’Agence France-Presse.
Le Parlement européen a adopté mi-mars une loi régissant les modèles d’intelligence artificielle, définissant des limites en matière de transparence, de propriété intellectuelle et de protection de la vie privée.
David Harris, conseiller au projet « California Initiative for Technology and Democracy », déclare : « Nous essayons d’apprendre des Européens et de collaborer avec eux pour comprendre comment établir des règles pour l’intelligence artificielle. »
Cette organisation vise à protéger les élections contre toute utilisation abusive des nouvelles technologies.
Plus de 30 projets de loi ont été soumis au Parlement californien, selon Harris, qui affirme que des responsables américains et européens l’ont consulté sur ce sujet.
Les textes soumis au Parlement californien abordent plusieurs aspects de l’intelligence artificielle.
Une des lois propose d’obliger les entreprises technologiques à divulguer les données utilisées pour créer des modèles d’intelligence artificielle.
Une autre proposition vise à interdire les publicités de campagnes électorales utilisant, d’une manière ou d’une autre, l’intelligence artificielle générative qui permet de créer du contenu (texte, image, son) en se basant sur une simple requête en langage courant.
Plusieurs députés souhaitent que les réseaux sociaux signalent tout contenu, image, vidéo ou enregistrement audio créé à l’aide de l’intelligence artificielle générative.
Un sondage mené en octobre par l’Université de Berkeley auprès des électeurs californiens a montré que 73 % d’entre eux soutiennent des lois pour lutter contre la désinformation ou les deep fakes et limiter l’utilisation de l’intelligence artificielle pendant les campagnes électorales.
Cette question est l’une des rares où les républicains et les démocrates sont d’accord.
« Avancés »
David Harris estime que les préoccupations liées aux deep fakes et aux textes falsifiés générés par l’intelligence artificielle sont l’une des questions les plus importantes.
Gail Bellerin, députée démocrate d’une circonscription englobant une partie de la Silicon Valley, soutient un projet de loi interdisant les deep fakes liés aux questions politiques dans les trois mois précédant les élections.
Elle affirme que « les acteurs malveillants utilisant cette technologie tentent de semer le chaos lors des élections ».
Le syndicat professionnel Net Choix, représentant les entreprises numériques, met en garde contre l’importation des normes de l’Union européenne en Californie.
Carl Zabo, directeur juridique de l’organisation luttant pour l’adoption de lois prévoyant des sanctions limitées, déclare : « Ils adoptent l’approche européenne pour traiter l’intelligence artificielle, qui vise à interdire cette technologie ».
Il affirme que « l’interdiction de l’intelligence artificielle ne stoppera rien », ajoutant : « C’est une mauvaise idée, car les acteurs malveillants ne respectent pas les lois ».
De son côté, le directeur juridique de l’éditeur de logiciels Adobe, Dana Rao, adopte une position plus modérée. Il salue la distinction opérée par l’Union européenne entre l’intelligence artificielle à faible impact, incluant les deep fakes et les textes falsifiés, et l’intelligence artificielle à « haut risque » utilisée notamment dans les infrastructures vitales ou l’application de la loi.
Rao déclare que « la version finale du texte nous convient ».
Adobe signale qu’elle a commencé des études pour évaluer les risques liés aux nouveaux produits basés sur l’intelligence artificielle.
Il ajoute : « Il faut accorder une attention particulière à la sécurité nucléaire et à la cybersécurité, ainsi qu’à toutes les occasions où l’intelligence artificielle prend des décisions importantes concernant les droits de l’homme ».
En collaboration avec l’organisation « Coalition for Content Proficiency and Authenticity », comprenant des membres tels que Microsoft et Google, Adobe a élaboré une série de données d’identification fournissant des informations sur la composition et le contenu d’une image.
Les députés californiens cherchent à être à l’avant-garde des régulateurs de l’intelligence artificielle, à l’instar des entreprises de l’État qui cherchent à développer cette technologie.
Gail Bellerin affirme que « les gens observent ce qui se passe en Californie ».
Elle ajoute : « C’est un mouvement qui nous concerne tous. Nous devons rester en avance sur ceux qui cherchent à semer le chaos lors des élections ».