Algérie : Karim Tabbou condamné à six mois avec sursis
Un tribunal algérien a prononcé une peine de six mois avec sursis et une amende de 50 000 dinars (372 $) à l’encontre du militant démocrate éminent Karim Tabbou, selon un groupe local de défense des droits.
Un activiste algérien, qui n’a pas divulgué son nom par peur de représailles, a déclaré que la formulation de la sentence indique que Tabbou ne purgera pas de peine de prison. Cependant, les observateurs voient la peine, prononcée mercredi, comme faisant partie d’une campagne plus large de harcèlement et d’arrestations contre les militants du mouvement pro-démocratie Hirak en Algérie.
Condamnation de Tabbou et Réactions
D’après le Comité national pour la libération des détenus, Tabbou a été reconnu coupable d’“incitation à l’attroupement non armé”, “outrage à un fonctionnaire” et “diffamation”.
Âgé de 49 ans, Tabbou est devenu l’un des militants les plus connus à émerger du Hirak lorsque des manifestations anti-gouvernementales ont éclaté en février 2019.
Toutefois, bien que le Hirak ait finalement conduit à la chute du président de longue date Abdelaziz Bouteflika, les protestataires n’étaient pas satisfaits. De nombreux manifestants ont continué à demander, sans succès, la démission de toutes les figures affiliées au gouvernement de Bouteflika et le retrait de l’armée de tous les domaines civils.
Tabbou a été acquitté d’autres accusations, notamment “profanation de cadavres” et “atteinte à l’intégrité du territoire national”.
Répression de la dissidence
Un rapport d’Amnesty International publié en mai 2022 a révélé qu’au moins 266 activistes et manifestants du mouvement Hirak étaient emprisonnés. La plupart ont été emprisonnés pour avoir critiqué les autorités, dénoncé la corruption de l’État et exprimé leur solidarité avec les détenus politiques.
La répression de la dissidence s’est poursuivie tout au long de l’année 2023.
Les journalistes n’ont pas été épargnés, Amnesty signalant en septembre dernier que 12 d’entre eux étaient derrière les barreaux. L’un des prisonniers politiques les plus en vue est Ihsane el-Kadi, un journaliste politique indépendant bien connu. Il purge actuellement une peine de sept ans de prison, dont deux avec sursis, après avoir été détenu en vertu d’une loi sur la sécurité de l’État.
Un porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères a refusé de commenter les rapports sur les violations des droits de l’homme dans le pays lorsqu’il a été contacté par Al Jazeera.
Situation actuelle du Hirak
La condamnation de Tabbou met en lumière bon nombre des défis auxquels le mouvement Hirak est confronté en Algérie.
De nombreux universitaires et militants ont soutenu que le mouvement est pratiquement disparu en raison des mesures prises par le gouvernement pour écraser le Hirak, notamment en interdisant à toute association de recevoir des fonds étrangers sans autorisation, ainsi qu’en élargissant la législation antiterroriste.
Le gouvernement est également accusé de tenter de coopter les partis politiques qui ont soutenu le mouvement pour diviser et éteindre l’élan des protestations.
De son côté, le président Abdelmadjid Tebboune a précédemment laissé entendre que les activistes du Hirak pourraient mener des “activités non innocentes” visant à “entraver le processus démocratique”.