Washington – Alors qu’Israël intensifie ses attaques sur la bande de Gaza, qui ont déjà fait plus de 8 000 morts et plus de 20 000 blessés à ce jour, les manifestations contre l’agression se poursuivent dans la plupart des villes américaines. Parmi les manifestations les plus marquantes, celles organisées et soutenues par des organisations juives américaines opposées aux politiques israéliennes et réclamant l’établissement d’un État palestinien indépendant.
Ces manifestations ont réussi à occuper pendant plusieurs heures la principale gare de trains de New York, la « Grand Central », ainsi que le « Capitole » (siège du Congrès) à Washington. Elles ont également fermé les entrées et les sorties de la Maison Blanche pour attirer l’attention sur leur demande de cessation immédiate des hostilités. Des dizaines de manifestants ont été arrêtés, mais la plupart ont été relâchés ultérieurement. L’organisation « If Not Now » est l’une des principales organisations impliquées dans la lutte contre l’agression israélienne contre Gaza. Elle met en lumière le droit légitime des Palestiniens à résister à l’occupation et dénonce les violations des droits de l’homme commises par Israël dans la région.
Elle fait également pression pour un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas. L’organisation est composée de Juifs américains qui exigent la fin du soutien américain au régime d’apartheid israélien, et qui prônent l’égalité, la justice et un avenir prospère pour tous les Palestiniens et Israéliens. Elle qualifie le gouvernement israélien de « régime violent assoiffé de sang » et affirme qu’Israël commet un « génocide » à Gaza. Ses militants ont participé à des sit-in devant les bureaux de leaders politiques, y compris Kamala Harris, la vice-présidente.
L’organisation « If Not Now » a été fondée en 2014 par de jeunes Juifs américains indignés par ce qu’ils considéraient comme une attaque disproportionnée d’Israël en réponse à la résistance palestinienne lors de l’agression israélienne contre Gaza à l’été 2014.
Historiquement, le groupe était principalement concentré sur l’occupation israélienne de la Cisjordanie et estime qu’il n’est pas moralement défendable. Il continue de critiquer les institutions juives américaines et les groupes de soutien à Israël pour leur soutien ou leur complicité dans le maintien de l’occupation.
Dans ce contexte, Al Jazeera a interviewé Eva Borgwardt, responsable de l’organisation, qui a accusé l’administration Biden de soutenir l’agression israélienne.
Voici le texte de l’interview:
« Nous avons été invités par la Maison Blanche ou le Département d’État à expliquer notre position ou à comprendre la position officielle américaine ?
Nous pensons que nos dirigeants devraient écouter les voix des Juifs qui sont personnellement touchés, inquiets pour leurs proches et qui appellent à un cessez-le-feu.
Ces voix représentent 40 % des jeunes Juifs américains et 25 % des Juifs en général qui considèrent Israël comme un État d’apartheid. Nous sommes clairs sur les raisons profondes de cela. Nous avons demandé une réunion lorsque nous étions en sit-in devant la Maison Blanche, mais Biden n’écoute pas, c’est pourquoi nous avons dû bloquer les entrées et les sorties de la Maison Blanche.
Quelle est votre stratégie pour changer la politique de Biden et la position de son administration face à la guerre à Gaza ?
Puisqu’ils ne nous écoutent pas, nous faisons en sorte qu’ils nous entendent. Nous descendons dans les rues et faisons face aux politiciens qui soutiennent la guerre, nous sensibilisons l’opinion publique sur les réseaux sociaux. Nous demandons également à nos représentants au Congrès de faire pression pour un cessez-le-feu immédiat, pour la libération des otages, pour une désescalade et pour mettre fin à l’occupation, à l’apartheid et au siège qui ont engendré ce cauchemar.
La voie choisie par Biden, contraire à un nombre croissant d’organisations respectées, y compris les Nations Unies, Amnesty International et les Juifs et Palestiniens américains, qui appellent à un cessez-le-feu, est une politique catastrophique qui n’est pas très populaire parmi les électeurs démocrates.
Comment gérez-vous les organisations pro-israéliennes telles que « AIPAC » ?
Tout d’abord, comme l’ont écrit des commentateurs israéliens, les politiques de droite extrême soutenues par « AIPAC » mettent les Israéliens ordinaires en danger. « AIPAC » et d’autres organisations de droite constituent une menace importante pour les droits palestiniens et pour le mouvement progressiste américain, et de plus en plus pour la sécurité des Juifs.
Elles mènent des campagnes de collecte de fonds soutenues par des milliardaires républicains de droite dont les dons financent les candidats de droite. Nous pensons que tous les Juifs devraient s’opposer bruyamment à cette tentative d’un groupe de pression de droite, tout comme nous nous opposons à d’autres groupes de pression de droite comme la National Rifle Association (NRA) pour le droit de porter des armes, non seulement en tant que conflit communautaire, mais comme extrémistes.
Lorsque je visite le musée de l’Holocauste dans la capitale, le message clair est « plus jamais ça », est-il possible de concilier cet engagement avec ce qu’Israël fait à Gaza ?
Il y a deux leçons que nous pouvons tirer de l’horreur de l’Holocauste, « plus jamais ça » pour nous en tant que Juifs, et « plus jamais ça » pour personne d’autre. Nous reconnaissons la persécution lorsque nous la voyons, et nous ne permettrons pas qu’elle se produise à quiconque d’autre.
La sécurité des Israéliens, comme nous l’avons clairement vu ces dernières semaines, ne peut être dissociée de la sécurité des Palestiniens, et la sécurité juive ne peut être dissociée de la sécurité de tous.
Le maintien des Palestiniens emprisonnés depuis des décennies et le traitement brutal de leur résistance pacifique ne sont pas une stratégie pour la sécurité des Juifs. De même, cette attaque horrible sur Gaza par des responsables qui utilisent ouvertement un discours de génocide dans le but final de nettoyage ethnique, personne n’est en sécurité ni libre tant que nous ne sommes pas tous libres et en sécurité, plus jamais pour nous signifie plus jamais pour personne.