Les illusions occidentales sur la pureté immaculée
Imane Khalif a remporté la médaille d’or dans la catégorie de 66 kg aux Jeux Olympiques de Paris 2024, en triomphant lors de la finale contre la Chinoise Liu Yang, le 9 août 2024. Avec cet exploit, elle devient la première femme algérienne, arabe et africaine à décrocher une médaille d’or en boxe dans l’histoire des Jeux Olympiques.
Un parcours semé d’embûches
Avant cette victoire, la boxeuse a affronté l’Italienne Angela Carini, qui a abandonné le match après seulement 46 secondes de combat. Émue, Carini a confié qu’un coup reçu au nez avait été le plus fort de sa vie.
Il est à noter que des rumeurs avaient circulé sur l’éventuel exclusion d’Imane Khalif par la Fédération internationale de boxe, non reconnue par le Comité international olympique, en raison de son échec à un test de virilité, entraînant des accusations insinuant que les deux boxeuses, Khalif et la Taïwanaise Lin Yu-Ting, seraient des hommes déguisés.
Un débat enflammé
Malgré son titre d’or, Khalif peine à surmonter ces événements. Elle choisit de ne pas s’aventurer dans des spéculations sur les motivations de Carini, plutôt que de traiter d’accusations de victimisation. Carini a affirmé qu’elle ne souhaitait pas faire de déclaration politique, exprimant simplement son regret pour Khalif. Cependant, le mal était fait, peu importe les intentions.
La dynamique de la victimisation
Dans son livre « Larmes blanches, cicatrices brunes », l’auteur aborde la position historique et contemporaine des femmes européennes comme symbole de la féminité idéale et de la notion de victime. Elle questionne la puissance des « larmes des femmes blanches », qu’elle préfère qualifier d’ »féminité blanche stratégique ».
Dans cette dynamique, la détresse émotionnelle des femmes blanches est souvent utilisée comme un moyen de punir les personnes de couleur en conflit avec elles.
Réactions publiques
Cela a suscité une forte vague de colère publique, accusant la fédération et dénonçant les événements. Des personnalités publiques, comme l’écrivaine J.K. Rowling, l’ancien président américain Donald Trump et la Première ministre italienne d’extrême droite Giorgia Meloni, ont réagi.
Chacune de ces figures a imposé sa propre idéologie au corps de Khalif. Rowling, connue pour son opposition aux femmes transgenres, a réduit la situation à une « plaisanterie de voir un homme frapper une femme, brisant ses rêves ». Ironiquement, tout en prétendant défendre les femmes, elle attaque en réalité une femme.
Questions de justice et de genre
Meloni n’est pas allée jusqu’à prétendre qu’Imane Khalif était un homme déguisé, mais a dénoncé ce qu’elle a qualifié de « compétition injuste », rappelant que « les athlètes ayant des caractéristiques génétiques masculines ne devraient pas participer aux compétitions féminines ». Ce raisonnement ignore le fait que l’histoire du sport féminin est truffée d’athlètes qui ne correspondent pas aux normes européennes de la féminité, y compris certaines qui étaient elles-mêmes européennes.
Autrefois, nous acceptions que certaines femmes soient plus grandes, plus fortes et plus rapides que d’autres. Aujourd’hui, beaucoup semblent attendre des athlètes qu’elles soient des stéréotypes les unes des autres, cherchant à punir celles qui ne correspondent pas à ce modèle. Malheureusement, malgré une sensibilisation croissante à la non-binarité, la tolérance envers toute différence avec la norme est devenue rare.
Racisme et sport
Le cas d’Ingrid Simbine, lors des Jeux Olympiques de Rio 2016, et la polémique autour des athlètes africaines, révèlent une préoccupation grandissante quant à la justice dans le sport féminin. Après la défaite d’une boxeuse bulgare, Svetlana Staniva, elle eut le geste polémique de dessiner un X avec ses doigts, symbolisant ses chromosomes XX, insinuant qu’elle était une « vraie » femme, contrairement à sa concurrente taïwanaise.
Les représentations culturelles
Imane Khalif, qui a pratiqué la boxe en compétitions féminines pendant de nombreuses années, y compris lors des JO de Tokyo 2020, n’avait jamais été au cœur de telles accusations auparavant. Ce en dépit du soutien qu’elle a reçu de la part du Comité olympique et des responsables algériens.
Un illustratif aperçu est donné par la photo controversée d’Anna Luca Hamori qui a été retirée, où Khalif n’est pas seulement présentée comme un homme dominant, mais déshumanisée, représentant un monstre mythique. Cette image fait écho à des siècles d’orientalisme, où les femmes non blanches sont soit victimes, soit des êtres masculins redoutables, non dignes de protection des hommes blancs.
Impact sur le discours occidental
Les corps des femmes sont devenus le terrain sur lequel l’Occident livre ses batailles idéologiques, où les femmes blanches apparaissent comme pures et innocentes, devant être défendues à tout prix. À l’inverse, les femmes aux peaux noires ou bronzées sont souvent perçues comme manquant de bonté, et leur protection est jugée superflue.
Alors que les représentations de la culture et de la race, ainsi que les questions de justice, se rejoignent au sein de ce débat, il devient impératif d’aborder ces idées pour faire avancer notre compréhension de l’inclusion dans le sport et la société en général.