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Et si, après les implants neuronaux capables de redonner la marche à des patients tétraplégiques, la médecine exploitait désormais les pouvoirs de la lumière, notamment via la photobiomodulation (thérapie par laser), pour prévenir et traiter les maladies neurodégénératives ?
Un nouvel axe de recherche
Tel est le nouvel axe de travail officiellement dévoilé cette semaine par le Fonds de dotation Clinatec, qui dirige l’institut du même nom, co-fondé en 2012 avec plusieurs acteurs majeurs de l’écosystème grenoblois : le CEA, le CHU Grenoble Alpes, et l’Université Grenoble Alpes.
Souvent comparé à l’institut américain de neurotechnologies Neuralink, Clinatec regroupe sur 6.000 m² au cœur du CEA de Grenoble des équipements de pointe en imagerie médicale, ainsi qu’un bloc opératoire. Sa mission est de développer des innovations médicales de rupture et non médicamenteuses, en s’appuyant sur les principes de la physique : la lumière, la réfrigération et l’électricité.
Des essais cliniques dès 2025
Après avoir récolté près de 30 millions d’euros depuis sa création en 2014 grâce à une quarantaine de mécènes, le fonds, désormais présidé par l’ancienne ministre Sophie Cluzel, prévoit de lever à nouveau une somme équivalente pour accompagner de nouveaux essais cliniques entre 2025 et 2030. Ces programmes de recherche seront tous liés à l’utilisation de la lumière à des fins thérapeutiques.
Appelée photobiomodulation, cette thérapie permettrait d’utiliser la lumière rouge ou proche infrarouge, grâce à des dispositifs non-invasifs (bonnets, ceintures abdominales) ou invasifs (sondes implantées dans le cerveau), pour pénétrer au cœur des tissus et des cellules du corps humain, qui réagissent à une certaine dose de lumière.
Projets en cours
Deux domaines d’application ont été identifiés pour des essais cliniques en 2025 : le traitement de la maladie d’Alzheimer et de la maladie à corps de Lewy. Le projet Neurotec, soutenu par le mécène Covea, vise à détecter les premiers signes de ces maladies par l’analyse de la lumière émise par les cellules cérébrales. Il prévoit également de les traiter en utilisant une illumination proche infrarouge des cellules du cortex cérébral via un dispositif non invasif de photobiomodulation transcrânienne.
La maladie de Parkinson, touchant près de 8,5 millions de personnes dans le monde, dont 200.000 en France, est une autre cible majeure. Le projet NIR, sous la direction du professeur Charbardès, prévoit l’implantation d’un dispositif médical pour ralentir la progression de la maladie. Un essai clinique est en cours et implique 12 patients.
Axes de recherche à long terme
Le fonds Clinatec étudiera cinq axes à long terme pour utiliser la lumière afin de détecter et prévenir diverses pathologies. Par exemple, ils se pencheront sur l’illumination de l’intestin et ses effets sur le microbiote, dans l’espoir de ralentir l’apparition de la maladie de Parkinson.
La récupération après un infarctus du myocarde et la prévention des maladies cardiovasculaires, qui représentent la première cause de décès au niveau mondial, sont également des priorités. Une autre recherche vise à aborder les troubles psychiatriques, en particulier les troubles bipolaires, ainsi que le vieillissement cérébral, qui augmente les risques de maladies graves.
Enjeux de la photobiomodulation
Bien que des études préliminaires évoquent le potentiel de la photobiomodulation, il reste essentiel de prouver son efficacité pour chaque nouvelle application. La question de la posologie idéale d’illumination pour chaque patient et chaque application demeure également à résoudre.
Le coût moyen d’un dispositif de stimulation cérébrale profonde est estimé entre 10.000 et 20.000 euros par patient. Clinatec doit également trouver des partenaires pour la commercialisation de ces nouveaux traitements, car son rôle principal est d’accélérer le transfert des solutions vers le grand public.
Applications actuelles
La photobiomodulation est déjà utilisée pour diverses applications, tant en France qu’à l’étranger. Par exemple, le centre de lutte contre le cancer Gustave Roussy a récemment intégré cette technologie pour améliorer la tolérance aux traitements de chimiothérapie et de radiothérapie. D’autres établissements, comme l’hôpital Georges-Pompidou, expérimentent également cette technique pour réduire les douleurs chroniques et améliorer la cicatrisation des plaies.