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Initiative ici et bonheur : Préservation du patrimoine en Égypte
Depuis l’Antiquité, l’Égypte se distingue par son intérêt pour le divertissement, avec des temples pharaoniques qui ont documenté des concerts, des chants et des hymnes. Les anciens Égyptiens profitaient également du fleuve Nil pour se divertir et se détendre. Le divertissement a toujours constitué un moyen d’évasion face aux difficultés de la vie, malgré les défis économiques et politiques rencontrés au fil des siècles.
Protection du patrimoine immatériel
Dans le but de préserver le patrimoine immatériel restant en Égypte, l’initiative « Khazana » a lancé un nouveau programme dédié à la documentation du patrimoine récréatif. Ce programme est le premier du genre à collecter l’histoire orale des divers endroits de divertissement dans plusieurs quartiers égyptiens, prenant en compte les caractéristiques de leurs habitants.
Le programme a été baptisé « Hana wa Surour », un nom qui évoque la joie et le bonheur. Selon Aliyah Nassar, coordinatrice du programme, cette initiative est née du constat que les moyens de divertissement traditionnels ont disparu, laissant place à des lieux de consommation comme les restaurants et les centres commerciaux, ce qui souligne la domination du matériel sur la vie des gens et l’absence de plaisirs simples dans les espaces ouverts.
Aliyah met en avant l’importance de la documentation orale du patrimoine récréatif ancien, qui met en lumière la valeur du patrimoine immatériel et renforce la capacité des participants à l’enregistrer eux-mêmes. À travers des ateliers, les participants apprennent à documenter ce patrimoine en utilisant leurs compétences, que ce soit par l’écriture, le récit ou le théâtre, afin de produire un contenu qui reflète ce qu’ils ont acquis durant le programme.
Un divertissement en déclin
Les premières sorties du programme « Hana wa Surour » ont débuté dans des régions telles que Faggala, Shubra Misr et Manial al-Roda, des lieux qui portent un héritage riche illustrant les différentes formes de divertissement du passé. Ce divertissement ne se limitait pas au cinéma et au théâtre, mais incluait également le corniche du Nil, les parcs publics qui étaient répandus dans les quartiers avant leur disparition, ainsi que les anciennes salles de divertissement et les petits théâtres, tels que ceux de Klout Bey et de la rue Mohamed Ali.
Le programme a également mis en lumière les lieux de divertissement autrefois réservés aux étrangers par rapport à ceux destinés aux Égyptiens, tout en racontant les histoires des habitants des vieux quartiers. Par exemple, la région de Faggala a une histoire riche, ayant abrité des maisons d’artistes, et sa proximité avec la gare de Ramsès en a fait un point névralgique pour ceux arrivant à ou quittant Le Caire, enrichissant son histoire par des récits dignes d’être documentés.
Exploration des lieux de divertissement au Caire
Aliyah Nassar a déclaré à Al Jazeera Net que, parmi les réalisations du programme « Hana wa Surour », une conférence a été donnée sur les lieux de promenade des Égyptiens au Caire durant les années cinquante et soixante, une période marquée par de grandes transformations politiques, passant de la monarchie à la république, ainsi que des changements sociaux qui ont soulevé de nouvelles questions comme le travail des femmes.
Elle a ajouté que cette période a marqué le début de la photographie dans les rues et autres lieux ouverts, permettant aux réalisateurs de mettre en avant les lieux de détente au Caire. Parmi ces lieux notables figurent les pyramides, qui sont devenues un espace public de loisirs, suivies par le fleuve Nil, que l’on pouvait apprécier en se promenant sur le corniche, en naviguant en bateau, ou en visitant des cafés et restaurants, selon la situation financière des personnages. La liste comprend également les ponts charitables et la tour du Caire, ainsi que des rues ombragées idéales pour le tournage de chansons de films.
Une soirée autour des célébrations égyptiennes
Dans le cadre d’un autre événement organisé par le projet « Hana wa Surour », Nassar a évoqué la préparation d’une soirée célébrant le premier anniversaire de l’école Khazana pour le patrimoine, qui mettait à l’honneur les célébrations égyptiennes. Elle a déclaré que le décor de l’événement était conçu avec des détails typiques des célébrations, tels que les véritables papillons en khayamiya, des branches lumineuses, ainsi que des éléments rappelant Roméo et Juliette et des machines à coudre.
Un salon spécial a été organisé, retraçant la période des années vingt aux années quatre-vingt-dix, en collaboration avec la bibliothèque des livres rares et des collections privées de l’Université américaine, ainsi que « Photo Egypt » qui a fourni de nombreuses images de célébrations, que ce soit dans les maisons, sur les toits ou dans des studios, tout en acceptant des contributions publiques, selon Aliyah Nassar.
Les expositions comprenaient de véritables robes de mariée et des vêtements de soirée, des registres de mariage du XIXe siècle, ainsi que diverses revues traitant des célébrations et des réseaux de mariées.
Aliyah Nassar souligne que le projet de documentation des lieux de divertissement s’étendra à d’autres gouvernorats au-delà du Caire, mais seulement après l’achèvement de sa première phase, car le Caire est une province vaste qui abrite de nombreux quartiers méritant d’être archivés et préservés.
L’histoire orale des Égyptiens
Aliyah Nassar souligne l’importance des ateliers de documentation des lieux de divertissement pour offrir une nouvelle perspective sur l’histoire de l’Égypte. Elle mentionne le succès d’un atelier dans la région de Faggala, qui a produit une nouvelle courte intitulée « Le héros des gens modestes » écrite par Mariam Abdel Aziz, l’une des participantes.
Elle considère que l’importance du projet peut ne pas être évidente maintenant, mais qu’elle deviendra avec le temps l’une des principales archives enregistrant des aspects de la vie des Égyptiens que les livres d’histoire traditionnels ne couvrent pas. Elle cite le livre de l’historien al-Maqrizi sur l’Égypte ancienne, qui reste une référence essentielle aujourd’hui, ainsi que « Une partie de ce qui s’est passé dans le pays d’Égypte » de Youssef el-Chérif, qui documentait la vie sociale et culturelle en Égypte des années trente aux années soixante-dix, en abordant des scènes de la vie au Caire, ainsi que des récits de cafés et d’artistes.
Aliyah affirme que la documentation orale est ce qui a permis de garder ces histoires vivantes et elle espère que les réalisations du projet « Hana wa Surour » seront publiées dans un livre racontant l’histoire du Caire et son rapport au divertissement.