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Steven Rapp, ancien ambassadeur des États-Unis pour la justice pénale internationale sous l’administration de l’ex-président Barack Obama, a posé la question suivante : « Un dictateur impitoyable peut-il échapper à la responsabilité de l’utilisation d’armes chimiques contre son propre peuple au motif qu’il bénéficie de l’immunité en tant que chef d’État en fonction ? ». Il a affirmé que l’immunité ne devrait pas être synonyme d’impunité, alors que la cour d’appel de Paris doit rendre sa décision sur cette affaire le 26 juin prochain.
Un diplomate américain demande aux juges de valider l’arrestation d’Assad
Dans son blog sur le site Mediapart, l’ambassadeur a rappelé que la Cour internationale de justice avait statué en 2002 que les chefs d’État, les chefs de gouvernement et les ministres des affaires étrangères en fonction bénéficient d’une immunité personnelle devant les tribunaux étrangers nationaux mais non devant les tribunaux internationaux, ce qui laisse entendre qu’un procès contre le président syrien Bachar al-Assad devant les tribunaux français n’est pas possible. Comme il est impossible de juger Assad devant un tribunal international, car la Syrie n’est pas partie à la Cour pénale internationale (CPI), la France a soumis une résolution au Conseil de sécurité des Nations Unies pour transférer la situation en Syrie à la CPI. Cependant, la Russie et la Chine ont opposé leur veto à cette résolution.
Contexte juridique international
Par conséquent, les victimes des attaques chimiques, dont certaines sont des Français, ont porté l’affaire devant les tribunaux nationaux. Après deux ans d’enquêtes, les juges d’instruction français ont émis en 2023 des mandats d’arrêt contre Assad, son frère Maher et deux autres hauts fonctionnaires syriens. Cette affaire concerne des attaques chimiques perpétrées contre la population civile de la Ghouta en août 2013, causant la mort d’environ 1400 personnes, dont des femmes et des enfants, et blessant des milliers d’autres. Des ONG, un mécanisme d’enquête onusien, une autre commission d’enquête ainsi que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) ont mené des enquêtes sur ces crimes, rassemblant de nombreuses preuves incriminant des hauts responsables syriens, y compris Assad. Cependant, le bureau du procureur français chargé de la lutte contre le terrorisme a demandé l’annulation du mandat d’arrêt contre Assad en raison de son immunité de chef d’État.
Procédures judiciaires nationales
L’ambassadeur américain a souligné que, bien que le droit international reconnaisse traditionnellement l’immunité des fonctionnaires d’État pour les actes commis dans leurs fonctions officielles, la France ne reconnaît pas Assad comme représentant légitime de la Syrie et a reconnu en 2012 la Coalition nationale des forces de l’opposition comme le « seul représentant du peuple syrien ». Paris a joué un rôle de premier plan dans l’interdiction des armes chimiques et a poussé le Conseil de sécurité à appeler à la responsabilité des auteurs d’attaques chimiques en Syrie. Cela pourrait permettre aux juges d’appel de poursuivre Assad un jour, créant ainsi un précédent applicable aux dirigeants de régimes hors-la-loi sanctionnés par la communauté internationale. En conclusion, l’ambassadeur américain a affirmé que pour qu’une interdiction des armes chimiques soit efficace, elle doit s’appliquer à Assad, soupçonné d’être grandement responsable de la violation de cette interdiction depuis des décennies, rappelant que la Cour internationale de justice avait elle-même déclaré en 2002 que l’immunité ne devait pas équivaloir à l’impunité.
Non-reconnaissance d’Assad comme représentant légitime