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Traque des tricheurs au handicap aux Jeux paralympiques 2024
Aux Jeux de Sydney en 2000, l’Espagne avait aligné des basketteurs simulant des déficiences mentales. Vingt-quatre ans plus tard, certains para-athlètes cherchent encore à contourner les règles.
Observation minutieuse des performances
Dans les tribunes bruyantes de l’Arena Paris Sud, deux officiels de la Fédération internationale de tennis de table tentent de se concentrer sur leur mission. Assis au « bureau technique », ils scrutent les services, les déplacements des joueurs, griffonnent des notes et regardent les ralentis. Leur préoccupation n’est pas tant le score, mais la conformité des capacités des joueurs à leur catégorie. Leur objectif est clair : identifier d’éventuels cas de tricherie ou d’arrangement avec les règles.
Un sujet délicat à aborder
Au sein de l’organisation des Jeux paralympiques, un responsable avoue presque avec gêne que si la tricherie est rare, elle existe bel et bien. « Lorsqu’on est athlète para, il est tentant d’affronter des adversaires plus handicapés. Certains peuvent donc exagérer leur état de santé pour bénéficier d’une meilleure catégorie », précise-t-il. Dans le jargon du Comité international paralympique (IPC), cette tromperie est nommée « déformation intentionnelle de ses compétences et de ses capacités » et constitue une infraction disciplinaire grave.
Les conséquences des infractions
La tricherie peut avoir de lourdes conséquences, comme en témoigne le cas du Turc Serkan Yildirim, qui a été privé de son titre de champion paralympique du 100 m quatre jours après l’avoir obtenu. Son niveau de déficience visuelle était « en cours de révision », selon la Fédération internationale de para-athlétisme.
Des suspensions et révisions notables
La Fédération internationale de para-athlétisme a déjà suspendu un sprinteur ouzbek, Dilshodbek Jabborov, pour avoir utilisé une fausse identité. En 2022, l’Indien Vinod Kumar avait également dû rendre sa médaille de bronze obtenue aux Jeux de Tokyo, certaines de ses performances étant jugées incohérentes avec son handicap.
Les contrôles renforcés
Les scandales passés, comme la révélation selon laquelle de nombreux basketteurs espagnols n’avaient aucun handicap mental, ont conduit à des contrôles plus rigoureux. Les vérifications s’intensifient : avant un match de cécifoot, les arbitres examinent les masques des joueurs. En natation, les lunettes opaques des nageurs non-voyants sont contrôlées à l’arrivée.
Défis lors des évaluations
Les médecins classificateurs sont formés pour détecter d’éventuelles tentatives de tromperie. Ils observent les sportifs pendant les sessions de classification, où ces derniers doivent démontrer leurs capacités avec précision. Les examens peuvent inclure des tests variés, de la marche sur les talons à des mesures de force.
Une pression croissante sur les classificateurs
Les responsables de la classification n’échappent pas aux pressions. Ils sont formés pour gérer ces situations délicates et signaler tout incident pour enquête et sanction éventuelle. Des athlètes mécontents peuvent demander une révision médicale pour contester leur classification, comme l’a fait le paracycliste Mathieu Bosredon, qui a réussi à changer de catégorie avant de briller lors des compétitions.
Un enjeu critique pour les para-athlètes
Les para-athlètes perçoivent la tricherie comme un acte aussi grave que le dopage. « C’est dommageable pour le parasport, il ne faut pas être naïf, il y a des enjeux financiers importants », souligne Margot Boulet, rameuse française. Les classificateurs, en revanche, s’efforcent de maintenir l’intégrité des compétitions, conscients des tentations qui pèsent sur les athlètes. « Vous aurez toujours des gens qui essaieront de tricher », conclut-elle.