Sommet à Aqaba entre Abdallah II, Sissi et Abbas: enjeux et attentes
Une rencontre au sommet tripartite se tient ce mercredi dans la ville jordanienne d'Aqaba, réunissant le roi jordanien Abdallah II, le président égyptien Abdelfattah al-Sissi, et le président palestinien Mahmoud Abbas. Il s'agit de leur première réunion depuis le début de l'offensive israélienne sur la bande de Gaza, qui se poursuit depuis 96 jours.
Cette réunion intervient alors que le secrétaire d'État américain Antony Blinken mène une série de discussions intensives en Israël. Sa tournée plus large inclut plusieurs capitales arabes et Ankara. Les observateurs pensent qu'elle vise à prévenir l'escalade du conflit et à discuter de l'après-guerre, en dépit des assurances données par les responsables israéliens sur la poursuite de la guerre jusqu'à atteindre les dirigeants du mouvement de résistance islamique Hamas ainsi que le retour des otages israéliens détenus à Gaza.
Dans un contexte où l'administration américaine continue de soutenir militairement et politiquement Israël dans sa guerre contre la bande malgré la chute de milliers de martyrs et des dizaines de milliers de blessés, et malgré les efforts arabes pour un cessez-le-feu et l'affaiblissement du soutien occidental à la guerre, plusieurs questions émergent sur les objectifs de la réunion tripartite qui aura lieu à Aqaba aujourd'hui et sur les décisions et conclusions éventuelles qui en découleront.
Après la guerre
Le journaliste et analyste politique Majid Abu Diak -dans un entretien pour Al Jazeera Net- souligne que la réunion coïncide avec la visite de Blinken, qui vise principalement à offrir un nouveau soutien à Israël pour continuer sa guerre.
Il estime que la réunion cherche à préparer la phase à venir, avec le côté américain parlant de limiter les cibles civiles à Gaza tout en se concentrant sur les résistants, bien que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu tarde encore à se plier à cette exigence américaine.
Dans la même veine, le politicien jordanien Marwan Faouri pense que la tournée de Blinken vise à esquisser les contours d'un compromis américain basé sur le retrait de la résistance palestinienne de l'équation future de Gaza en échange d'un simple changement de ton de la part des États-Unis, et non un arrêt de la guerre qui, selon certaines fuites et non des déclarations officielles, indique que l'administration du président Joe Biden pourrait envisager un projet potentiel de cessez-le-feu.
Un communiqué émis par le bureau royal jordanien concernant le sommet indique que les dirigeants "discuteront des sérieux développements dans la bande et des nouveautés en Cisjordanie" et confirme qu'elle s'inscrit dans le cadre des "efforts continus de la Jordanie pour coordonner les positions arabes, pour presser pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza et pour livrer l'aide humanitaire constante".
Dans ce contexte, l'analyste politique Abu Diak rappelle que "l'Égypte et la Jordanie ont déjà exprimé leur refus du transfert des Palestiniens, clairement, et c'est une position importante, mais elles pourraient maintenant vouloir coordonner les positions pour l'après-guerre".
Il ajoute que "ce qui est frappant, c'est une déclaration antérieure du président américain Joe Biden qui a mentionné que des pays, y compris la Jordanie, l'Égypte et la Turquie, étaient prêts à s'occuper de l'après-guerre, mais il n'a pas précisé la nature du rôle que ces pays arabes et la Turquie pourraient jouer".
Prévisions
Les observateurs estiment que les dirigeants réunis aujourd'hui à Aqaba n'ont pas de véritables leviers politiques pour faire pression sur Israël pour l'arrêter de commettre des crimes à Gaza, ni pour amener les États-Unis à répondre à leurs demandes pour un arrêt de l'agression. Ainsi, des analystes tels que Majid Abu Diak s'attendent à ce que les conclusions du sommet soulignent la position de rejet de l'Égypte et de la Jordanie envers le déplacement des Palestiniens de leur terre, et appellent à l'arrêt de la guerre.
Abu Diak déclare : "Malheureusement, jusqu'à présent, nous constatons que la position égyptienne au point de passage de Rafah est négative, conforme à ce qu'exige Israël. Étant donné que ces pays tiennent un sommet, il est nécessaire qu'il y ait une autre position en faveur de l'introduction d'aide à Gaza, de la levée du blocus et, bien sûr, de l'arrêt de la guerre".
Il critique également les positions arabes faibles, qui n'ont pas réussi à atteindre le niveau de soutien à Gaza offert par d'autres pays non arabes en réaction à l'agression israélienne, et regrette que "les pays arabes n'ont pas soutenu l'Afrique du Sud dans son effort pour déposer une plainte contre Israël à la Cour pénale internationale pour les crimes de guerre et le nettoyage ethnique dans la bande de Gaza".
Les positions arabes -malheureusement- restent bien en dessous de ce qui est nécessaire pour soutenir leurs frères dans la bande de Gaza, soit en termes d'arrêt de la guerre ou de pression pour ouvrir les frontières et apporter l'aide nécessaire à la bande de Gaza.
Selon des rapports de presse, il est attendu que les trois dirigeants appellent à la fin de la réunion à un cessez-le-feu immédiat et affirment la nécessité de retourner à la voie politique pour trouver une solution juste et globale à la question palestinienne sur la base de la solution à deux États, conformément aux résolutions des Nations Unies. Le communiqué final devrait également confirmer le rejet des tentatives de liquider la cause palestinienne.