Ved Chirayath : Une révolution dans l’océanographie
À Coral Gables, en Floride, Ved Chirayath est déterminé à accomplir ce qu’il décrit comme le « saint graal de l’océanographie » : développer une technologie capable d’imager les fonds marins avec la même précision que les télescopes astronomiques observent le cosmos. Son travail de fond sur les secrets des océans, encore largement inexplorés, a récemment reçu un soutien significatif de la part de la Gordon and Betty Moore Foundation, qui l’a sélectionné parmi les cinq lauréats du 2024 Moore Inventor Fellows.
Un soutien pour innover
Le programme Moore Inventor Fellows honore l’enthousiasme de Gordon Moore pour la science et l’innovation. Il a été lancé en 2016 afin de célébrer le 50e anniversaire de la loi de Moore, prédisant la croissance exponentielle de la puissance de calcul. Chaque lauréat reçoit un financement de 825 000 dollars sur trois ans, dont 50 000 dollars par an provenant de son institution d’origine.
Chirayath est titulaire de la chaire G. Unger Vetlesen en sciences de la Terre à l’Université de Miami, directeur inaugural du Aircraft Center for Earth Studies, et explorateur pour National Geographic. Précédemment, il dirigeait le laboratoire pour la détection avancée de la NASA au Ames Research Center en Californie.
Lensing actif : une innovation audacieuse
Son idée la plus récente, qui pourrait transformer l’océanographie, est celle du lensing actif. Cette technologie combine deux de ses précédentes inventions brevetées par la NASA. Le lensing passif est un modèle théorique permettant de photographier l’océan avec une clarté remarquable, tandis que MiDAR, un dispositif d’imagerie de nouvelle génération, a été reconnu comme l’invention de l’année 2019 par la NASA.
Selon Chirayath, le lensing actif permettrait d’imager à travers les vagues de l’océan pour observer la faune marine, le fond marin et les plastiques marins depuis des avions et des futures sondes spatiales, tout comme les télescopes scrutent l’univers. La technologie actuelle de lensing passif permet d’imager jusqu’à 20 mètres de profondeur grâce à la lumière du soleil. Le lensing actif, quant à lui, utiliserait des sources lumineuses actives comme des lasers pour explorer des zones encore plus profondes.
Un avenir plein de promesses
La bourse Moore soutiendra Chirayath pour faire progresser le lensing actif, passant des concepts fondamentaux à un prototype opérationnel. Son objectif ultime est d’atteindre le même niveau de connaissance concernant les océans que celui atteint pour les terres émergées et l’espace.
« Nous avons cartographié davantage la surface de Mars, du Soleil et de la Lune que notre propre plancher océanique », souligne Chirayath. « Pourtant, l’océan est l’écosystème le plus vaste de la planète, représentant 99 % du volume habitable de la Terre, essentiel à notre survie et en rapide mutation à cause du changement climatique. »
Il cite également le Sustainable Land Imaging Program, une collaboration entre la NASA et le U.S. Geological Survey, comme exemple à suivre pour cartographier les océans. « L’océan est trois fois plus vaste que les terres, et notre capacité de mesure y est encore insuffisante. Je souhaite changer cela en intégrant des robots sous-marins et des plateformes aériennes et spatiales. »
Une Vision pour l’Océanographie
Roni Avissar, doyen de la Rosenstiel School, souligne que des agences fédérales comme la NASA financent généralement ces technologies de pointe uniquement une fois qu’elles ont atteint un stade de preuve de concept. Avec la Moore Inventor Fellowship, Chirayath a l’opportunité de faire avancer son projet de lensing actif, qu’il a déjà réussi à concrétiser à deux reprises précédemment.
Chirayath exprime sa gratitude pour cette reconnaissance, considérant cette bourse comme « un rêve devenu réalité ». Il réalise cependant la pression que cela engendre, car le processus de sélection implique de rivaliser avec des percées dans diverses disciplines, y compris la médecine.
« J’ai consacré la majeure partie de ma carrière à comprendre pourquoi il est si difficile de cartographier le fond marin, car ne pas savoir ce qui se passe dans notre monde est périlleux », conclut-il. « Notre planète est unique—il n’y a vraiment pas d’endroit comme la maison. »