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Libye : Stratégies d’adaptation au changement climatique en urgence
Avant la tempête Daniel qui a frappé l’est de la Libye en septembre 2023, les discussions sur le changement climatique en Libye et ses effets catastrophiques étaient principalement limitées à des avertissements sporadiques émis par des spécialistes et des intéressés. Souvent, seuls les experts et les universitaires suivaient ces préoccupations.
Cependant, les pertes considérables subies par Derna et d’autres villes de l’est, en plus des inondations dévastatrices qui ont transformé les déserts arides du sud-ouest en étangs, ont attiré l’attention de nombreux acteurs sur la gravité de la situation. Les déserts représentent 95 % de la superficie totale de la Libye, qui s’étend sur environ 1 759 000 kilomètres carrés, et la désertification est l’un des défis climatiques les plus pressants.
Causes et manifestations
Le professeur de botanique à l’Université de Benghazi, Tarek Al-Maqsabi, résume les manifestations de la désertification et du changement climatique ainsi que leurs causes en trois points :
- La réduction de la saison des pluies et la diminution des précipitations annuelles, qui, dans le passé, s’étendaient de fin octobre à fin mars, se limitent désormais presque exclusivement aux mois de décembre et janvier au cours des trente dernières années.
- La forte baisse des précipitations annuelles, qui ne dépassent plus 400 mm par an, à l’exception des taux exceptionnels apportés par la tempête Daniel.
- Une augmentation significative des températures, avec des moyennes mensuelles record enregistrées ces dernières années en Libye.
Al-Maqsabi a ajouté que ces trois facteurs ont eu un impact direct sur la végétation côtière de la Libye, entraînant la disparition de nombreuses espèces de plantes sauvages le long des côtes de Benghazi.
Développement urbain
Face à la désertification et au manque de ressources en eau, le rythme des projets de reconstruction à Benghazi, dans l’est de la Libye, s’accélère, visant à revégétaliser les espaces verts et les jardins. Cela soulève des questions sur la pertinence de ces projets par rapport aux conditions climatiques de la ville et leur capacité à lutter contre la désertification et à améliorer le climat.
Le professeur Al-Maqsabi considère que les efforts de reboisement des jardins et de revégétalisation sont « insuffisants ». Il affirme que le changement climatique extrême en Libye nécessite l’élaboration d’un projet national à long terme pour sensibiliser le public à l’environnement et activer leur rôle dans la lutte contre la désertification, en mettant également l’accent sur l’importance d’éduquer les jeunes sur l’amour de l’environnement et la préservation des espaces verts.
Adaptation au climat
La chercheuse en géologie et activiste environnementale, Yasmin Al-Ahmar, a souligné le manque de politiques et de plans stratégiques en Libye pour s’adapter aux changements climatiques, malgré la signature de nombreux accords internationaux. Elle a appelé à identifier les zones les plus vulnérables et à créer une base de données complète utilisant les systèmes d’information géographique pour soutenir le processus décisionnel.
- Assurer la durabilité des ressources en eau grâce à des techniques de récolte des eaux, telles que la création de réservoirs et de petits barrages pour stocker les eaux de pluie.
- Protéger les bassins d’eau et les ressources souterraines de l’épuisement, et réhabiliter les sols dégradés.
- Protéger les zones côtières contre les effets de l’élévation du niveau de la mer en construisant des barrières naturelles.
Al-Ahmar a également noté l’importance de l’implication des gouvernements dans les négociations climatiques pour promouvoir des projets d’adaptation aux changements climatiques.
Sensibilisation
Abou Bakr Al-Mansouri, membre de l’organisation « Idama » et de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN), a exprimé qu’il y a un « grand manque » dans l’établissement de législations nécessaires pour protéger la végétation et sa biodiversité. Il a également souligné que le manque de sensibilisation environnementale et le faible soutien technique et financier sont des défis majeurs à surmonter.
Pour remédier à cela, il a proposé de promouvoir le tourisme écologique et d’impliquer les jeunes dans des programmes liés à la nature, afin de renforcer la sensibilisation à l’environnement.
Initiatives des jeunes
Le directeur exécutif de l’organisation « Likaw », Al-Zubair Al-Barki, a mis l’accent sur l’importance de l’implication des jeunes dans les initiatives liées au changement climatique. Il a observé une large diffusion des campagnes de sensibilisation et des initiatives des jeunes dans le domaine de la protection de l’environnement via les réseaux sociaux.
Al-Barki a souligné que, malgré le contexte politique divisé qui entrave l’adoption d’un plan unifié à long terme pour lutter contre le changement climatique, la jeunesse libyenne a le potentiel d’apporter un changement significatif dans ce domaine.