Rénovation urbaine à Nîmes : un pari audacieux pour Pissevin
Au sommet de la vaste terrasse de la résidence Soleil-Levant, Alain Lorgeas, président du comité de quartier et âgé de 84 ans, scrute le paysage de son quartier. En englobant Valdegour, le quartier voisin, Pissevin abrite environ 16 000 habitants dans un environnement minéral où alternent rectangles de béton et touffes de verdure formées par des oliviers et des pins parasol. À l’horizon, trois pelleteuses s’affairent sur le site de la démolition de la tour Pollux, marquant le début d’une opération de rénovation urbaine ambitieuse qui devrait transformer le quartier d’ici 2027.
Une réalité difficile à Pissevin
D’un autre côté, depuis cette même terrasse, deux silhouettes vêtues de noir attirent également l’attention. Ces jeunes, désignés comme des « choufs », sont chargés de surveiller un point de vente de drogue en alertant les dealeurs lors de l’arrivée de la police. Lorsque ceux-ci arrivent, les jeunes s’éclipsent avec nonchalance, une scène qui s’est répété à maintes reprises, au grand désespoir d’Alain Lorgeas qui admet ne plus y prêter attention.
Un quartier aux prises avec la pauvreté
Pissevin a connu des jours meilleurs. Récemment, le Raid a interpellé un suspect dans une de ses tours lié à une tentative d’incendie, et un poste de police flambant neuf a été partiellement détruit même avant son inauguration. Ce poste était la promesse du ministre de l’Intérieur après des événements tragiques, mais la violence continue de frapper la communauté. Le quartier, initialement conçu dans les années 1960 pour accueillir des rapatriés d’Algérie, compte aujourd’hui 70 % de sa population vivant sous le seuil de pauvreté, avec une forte diminution de ses commerces.
Un environnement propice à la délinquance
Rémy Alonso, secrétaire départemental d’Alliance-Police nationale, souligne que la géographie de Pissevin, proche des autoroutes, rend le trafic de drogue particulièrement lucratif. L’architecture caractérisée par une dalle avec de nombreux recoins favorise les activités illicites. Un bon point de deal peut rapporter jusqu’à 30 000 euros par jour, attirant ainsi de nombreux trafiquants.
Le projet de rénovation urbaine
La vaste opération de rénovation urbaine, qui a démarré l’an dernier après avoir été projetée pendant quinze ans, vise à améliorer les conditions de vie des habitants. Alain Lorgeas et Raouf Azzouz, directeur du centre social Les mille couleurs, s’accordent à dire que si le projet est prometteur, il ne faut pas s’attendre à des miracles. La démolition des zones à problèmes est une priorité du maire adjoint chargé du suivi de la rénovation, Olivier Bonné.
Un défi de mixité sociale
Mathias Nieps, sous-préfet du Gard, insiste sur l’importance de recréer une mixité sociale dans le quartier. Bien que près de 700 logements soient prévus pour démolition, l’accent sera mis sur le relogement des habitants et la dédensification du quartier. Des logements en accession à la propriété seront également construits pour éviter une concentration d’habitants en situation de précarité.
Le rôle des services publics dans la revitalisation
Les initiatives ne s’arrêtent pas à la construction de nouveaux logements. L’intégration de services publics, tels qu’un nouveau poste de police et une médiathèque, est essentielle pour redynamiser le quartier. Les escales de vie, avec des commerces de proximité, doivent également voir le jour pour que les habitants n’aient plus à se déplacer pour faire le plein de provisions.
Finalement, la rénovation urbaine à Nîmes représente un défi majeur pour le quartier de Pissevin, tant au niveau de l’urbanisme qu’en matière de lutte contre la pauvreté. Une transformation attendue, mais qui nécessitera des efforts soutenus pour véritablement renverser la donne.