Pérou : Troisième jour de deuil national après la mort de Fujimori
Le gouvernement du Pérou a annoncé une période de deuil national de trois jours suite au décès de l’ancien président controversé Alberto Fujimori. La présidente Dina Boluarte a signé un décret de deuil jeudi, un jour après la mort de Fujimori, condamné pour corruption et violations des droits humains durant son mandat. Il est décédé au domicile de sa fille, Keiko Fujimori, dans la capitale, Lima.
« Ce matin, le drapeau national a été mis en berne au Palais législatif suite à la mort de l’ancien président de la République, Alberto Fujimori », a rapporté le journal officiel El Peruano jeudi.
Le corps de Fujimori sera exposé au Ministère de la Culture à Lima jusqu’à samedi, date à laquelle il sera transféré dans un cimetière au sud de la capitale. Le média Peru 21 a publié sur les réseaux sociaux des photos montrant des partisans faisant la queue devant le Ministère de la Culture pour lui rendre hommage.
Luttant contre Sendero Luminoso
Dans la mort comme dans la vie, Fujimori a polarisé le Pérou, la nation andine où ses partisans lui attribuent le mérite d’avoir redressé l’économie grâce à une série de réformes néolibérales sévères et d’avoir écrasé le groupe guérillero maoïste Sendero Luminoso. Ce groupe a terrifié le pays pendant des années.
Il a réussi cela grâce à une campagne brutale de contre-insurrection qui a impliqué des violations des droits humains en masse et a contribué à l’augmentation du caractère autoritaire du régime de Fujimori, y compris un « auto-coup » en 1992 qui a fermé le Congrès et le pouvoir judiciaire. Ses réformes économiques ont également été critiquées pour leur impact sévère sur les plus pauvres du pays.
- Estimation de plus de 70 000 décès durant la guerre civile au Pérou entre le gouvernement et divers groupes rebelles.
- Le gouvernement de Fujimori a également été associé à des abus tels qu’une campagne de stérilisations forcées ciblant les femmes dans les régions pauvres et majoritairement indigènes du pays.
Le scandale Montesinos
Fujimori s’est exilé au Japon après son éviction en 2000, suite à un scandale de corruption impliquant son chef des services secrets notoire, Vladimiro Montesinos. Fujimori a été finalement arrêté au Chili lors d’une visite en 2005, puis extradé vers le Pérou en septembre 2007, faisant face à des accusations de commandement de meurtres et d’enlèvements durant son mandat.
Il a été jugé et condamné en 2009 pour des crimes liés au meurtre de 25 personnes par des escadrons de la mort ciblant les militants de gauche ainsi que des activistes et des civils.
Fujimori a été libéré de prison en décembre 2023 par un tribunal péruvien, en défiant un ordre de la Cour interaméricaine des droits de l’homme.
Sur les réseaux sociaux, des hashtags allant de #FujimoriNuncaMas (Fujimori jamais plus) à #FujimoriPorSiempre (Fujimori pour toujours) soulignent les divisions qui persistent dans la société péruvienne plus de deux décennies après qu’il a fui le pays et a présenté sa démission par fax depuis le Japon.
Un héritage complexe
Les détracteurs ont souligné, avec ironie, que Fujimori est décédé le même jour que le chef de Sendero Luminoso, Abimael Guzman, qui est mort en prison en 2021. Sa capture par les services de sécurité de l’État en 1992 fut une victoire majeure dans les efforts du gouvernement pour démanteler le groupe redouté.
La fille de Fujimori, Keiko, ancienne législatrice et candidate présidentielle, a déclaré en juillet que son père aurait envisagé de se présenter à la présidentielle de 2026, bien qu’il ait été âgé de plus de 80 ans.