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Manœuvres iraniennes en mer Rouge : démonstration ou dissuasion ?
Téhéran – Dans le contexte de tensions croissantes suite à la première confrontation directe entre la milice houthie du Yémen et la marine américaine en mer Rouge, le destroyer iranien "Alborz" accompagné du navire militaire "Bushehr" traverse le détroit de Bab-el-Mandeb, coïncidant avec des pourparlers intensifs menés par le porte-parole des Houthis, Mohammed Abdelsalam, avec de hauts responsables iraniens.
Officiellement, l'agence de presse "Tasnim", proche des Gardiens de la révolution à Téhéran, indique que la flotte iranienne effectue des missions de routine dans les eaux internationales pour sécuriser les voies de navigation et contrer la piraterie maritime, en plus d'autres tâches. Cependant, les cercles iraniens croient que cette démarche de leur pays fait suite à une menace de Londres de lancer une attaque directe contre la milice houthie alliée à l'Iran.
L'action iranienne intervient seulement quelques heures après un appel téléphonique entre le ministre des Affaires étrangères iranien, Hossein Amir Abdollahian, et son homologue britannique David Cameron concernant les évolutions de la mer Rouge ; où le dernier a tweeté sur la plateforme "X", "J'ai clairement indiqué qu'Iran porte une part de responsabilité dans la prévention de ces attaques, en raison de son soutien de longue date aux Houthis."
Les raisons et les objectifs
Commentant les raisons pour lesquelles son pays a envoyé sa flotte à la mer Rouge à ce moment précis, l'ancien commandant des Gardiens de la révolution, le général à la retraite Hossein Kanani Moghadam, dit que cela vient "en réponse à la militarisation de la mer Rouge et aux démonstrations de force des troupes étrangères".
Dans son discours à Al Jazeera Net, Kanani Moghadam souligne la visite continue de Mohammed Abdelsalam à Téhéran, affirmant que Téhéran ne laissera pas ses alliés houthis "faire face seuls à l'arrogance sionisto-américaine", ajoutant que la République islamique a déjà averti qu'elle ne permettrait pas aux étrangers de s'ingérer dans notre région.
Avant la formation de l'alliance "Guardian of Prosperity" pour contrer les Houthis le mois dernier, le ministre iranien de la Défense, Mohammad Reza Ashtiani, a averti les États-Unis qu'ils "feraient face à des problèmes exceptionnels s'ils tentaient de former une force internationale pour protéger la navigation dans la mer Rouge", déclarant qu' "aucun acteur ne peut se mouvoir dans une région où l'Iran détient la mainmise."
L'ancien dirigeant des Gardiens de la révolution pense que la mer Rouge est devenue encore plus rouge par le sang versé de dix Houthis lors d’une attaque américaine cette semaine, considérant que la stabilisation de la flotte iranienne près de "Bab-el-Mandeb" envoie un message de soutien aux Houthis et un message de dissuasion à la coalition américaine et à ses aventures là-bas.
Escalade des tensions
Kanani poursuit en disant que le mouvement militaire iranien vers la mer Rouge, où se trouve l'allié yéménite, envoie un avertissement clair aux Américains et aux Britanniques sur les dangers de toute atteinte aux Houthis, car ils sont une partie essentielle de l'axe de la résistance, assurant que Téhéran ne lancera pas une guerre dans la mer Rouge à moins que les forces étrangères ne commencent à attaquer ses intérêts.
Kanani Moghadam souligne que la sécurité dans la mer Rouge ne sera garantie que par les efforts des habitants de la région, et non par des forces étrangères, ajoutant que les Houthis contrôlent le détroit de "Bab-el-Mandeb" pour en faire le deuxième passage maritime stratégique sous la supervision de l'axe de la résistance après le détroit d'"Hormuz".
Le même interlocuteur explique que la partie yéménite mène des opérations pour soutenir les opprimés en Palestine et exercer une pression sur l'ennemi sioniste pour mettre fin au blocus de la bande de Gaza, "et il n'a pas l'intention de perturber la navigation maritime, mais cible uniquement les navires liés à l'entité sioniste".
Il conclut que tous les indicateurs suggèrent que les tensions vont intensifier dans les eaux de la mer Rouge dans les prochains jours, "si l'entité sioniste poursuit le génocide du peuple palestinien avec le soutien de l'Occident".
Kanani confirme que le côté yéménite ne reculera pas de son engagement envers le peuple de Gaza et poursuivra la fermeture du détroit de "Bab-el-Mandeb" face aux navires à destination d'Entité sioniste, ainsi l'intervention américaine contre les Houthis pourrait enflammer une région déjà tendue.
Démonstration de force
En revanche, Ali Bigdeli, professeur de relations internationales à l'Université "Shahid Beheshti", voit dans la décision de son pays de déplacer sa flotte navale vers la mer Rouge "une démonstration de puissance et un message de soutien aux Houthis", expliquant que le destroyer "Alborz" est très ancien et, malgré les mises à jour au fil des ans, ses capacités ne sont pas à la hauteur pour affronter les flottes internationales présentes dans la région.
Bigdeli – dans ses propos à Al Jazeera Net – exclut toute confrontation réelle entre les navires de guerre iraniens et occidentaux près du détroit de "Bab-el-Mandeb", confirmant que Téhéran et les capitales occidentales, y compris Washington, ne souhaitent pas l'escalade à l'heure actuelle.
Bigdeli interprète les discussions du porte-parole officiel des Houthis, Mohammed Abdelsalam, à Téhéran, dans le contexte de la coordination entre l'Iran et le Yémen suite aux messages adressés par les puissances occidentales à la République islamique, en tant qu'alliée proche des Houthis.
Bigdeli estime que son pays a reçu des messages occidentaux incitant Téhéran à exercer une pression sur les Houthis pour réduire les tensions en mer Rouge, affirmant que l'Iran demande en retour une pression occidentale sur Entité sioniste pour arrêter la guerre continue sur Gaza, et que Téhéran pourrait positivement répondre à toute démarche occidentale vers cet objectif.