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Mohamed Al Fayed aurait manipulé les directeurs de Harrods pour dissimuler ses actes répréhensibles, licenciant ceux qu’il ne pouvait pas contrôler, selon un ancien directeur qui s’est exprimé auprès de la BBC.
Des enveloppes de cash pour contrôler les directeurs
Jon Brilliant, qui a travaillé dans le bureau privé d’Al Fayed pendant 18 mois, affirme que l’entrepreneur décédé le couvrait d’enveloppes pleines d’argent, totalisant environ 50 000 $ (environ 39 000 €), pour tenter de le compromettre et de le contrôler. “Il a essayé de vous posséder. Et finalement, j’ai été licencié parce que je ne pouvais pas être acheté,” déclare-t-il.
Harrods n’a pas répondu aux accusations de M. Brilliant. L’entreprise a précédemment déclaré qu’elle était “totalement bouleversée” par les allégations d’abus, ajoutant qu’elle est une “organisation très différente de celle détenue et contrôlée par Al Fayed”.
Une atmosphère de méfiance
M. Brilliant se dit “horrifié” d’apprendre les allégations selon lesquelles Al Fayed aurait abusé de centaines de femmes. Il se reproche de ne pas avoir remis en question davantage des pratiques qu’il a observées. Il a évoqué une culture de surveillance, de licenciements et de méfiance qui empêchait les directeurs de s’entraider ou de poser des questions sur le traitement des femmes par Al Fayed.
“Je peux voir à 100 % comment la structure de gestion et la culture étaient mises en place pour dissimuler cela, pour le masquer aux gens,” souligne M. Brilliant. Quatre autres anciens directeurs ont confirmé, sous anonymat, des éléments de ce tableau.
Des tentatives de contrôle par l’argent
Un citoyen américain, M. Brilliant avait 36 ans lorsqu’il a rejoint l’entreprise en août 2000 pour relancer l’activité en ligne de Harrods. Peu avant son premier voyage d’affaires à Seattle, Al Fayed lui a remis une enveloppe brune contenant 5 000 $ (environ 3 993 €) en billets de 50 $. Après le voyage, il a tenté de rendre la totalité de la somme, mais Al Fayed a refusé, lui demandant s’il n’avait pas besoin de divertissement.
Recevoir de l’argent avant les voyages d’affaires s’est poursuivi pendant six mois, et trois collègues seniors ont suggéré à M. Brilliant qu’Al Fayed tentait de le compromettre.
Surveillance et méfiance
M. Brilliant pense qu’il n’était pas à l’abri de la surveillance intensive d’Al Fayed, soutenue par une grande équipe de sécurité. “En racontant cette histoire, ça me donne des frissons de réaliser que mes téléphones étaient écoutés,” dit-il.
Il a commencé à soupçonner qu’il était surveillé en 2002, juste avant son licenciement, lorsqu’une conversation privée a été citée lors d’une réunion. Un autre ancien directeur de Harrods a également rapporté avoir été averti par un membre de l’équipe de sécurité qu’il vivait dans une propriété sous écoute.
Une culture du silence
Les directeurs de Harrods étaient placés en opposition les uns aux autres, ce qui favorisait un climat de méfiance. M. Brilliant a noté que l’information était traitée comme une “monnaie” et que chacun tentait de partager des informations pour “faire plaisir” à Al Fayed. “Il n’y avait pas de confiance entre les directeurs,” a confirmé un autre ancien directeur sous anonymat.
Dans sa biographie de 1997, le journaliste Tom Bower a décrit Harrods comme une “cour médiévale,” où la survie des cadres dépendait de leur “loyauté absolue” et de “ragots salaces” pour semer le doute sur les rivaux.
Un appel à la prise de parole
M. Brilliant, de retour aux États-Unis, dit avoir été “stupéfait” en entendant parler de l’enquête de la BBC. “Je me demande si j’aurais dû voir quelque chose,” avoue-t-il. Bien qu’il ait travaillé chez Harrods pendant 18 mois, il souhaite témoigner pour deux raisons : soutenir les femmes maltraitées et encourager d’autres à s’exprimer.