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Khartoum en péril : Comment ses habitants la retrouveront après la guerre
Il est poignant de réaliser que la capitale de son pays n’est plus là, que plus rien de ce qui reste ne laisse supposer qu’il s’agit de Khartoum, la mariée des deux Nil, avec son parfum et son authenticité. Aujourd’hui, après une guerre toujours en cours, la ville est méconnaissable, de nombreux de ses rares sites archéologiques ont été soit détruits, soit complètement effacés.
Entre deux palais
Le Palais Républicain, actuellement retranché par les forces rebelles, a subi des dégâts considérables dus à la guerre, le rendant inapte à exercer le pouvoir. Il existe en réalité deux palais : l’un construit par l’ancien président Omar El-Béchir en 2015, et l’autre ancien palais, surplombant le Nil Bleu, chargé d’histoire depuis le lever du drapeau de l’indépendance en janvier 1956; pourtant, même sans être un point stratégique, il ne survivra pas longtemps dans les meilleures conditions en raison des combats et de la puissance destructrice qui l’entoure.
Le cri de la directrice du musée naturel
Un autre monument touché par les ravages est le musée naturel de Khartoum où tous les animaux et oiseaux y périssent lentement de soif et de faim, y compris des serpents, des scorpions, des crocodiles et des insectes venimeux. Beaucoup ont été collectés avec grande difficulté, et il n’existe pas d’autres spécimens au Soudan. Malgré les appels de la directrice du musée Sara Abdullah pour sauver le musée, tous les efforts pour déplacer les créatures en sécurité ont échoué, les conduisant à l’extinction. Les habitants de Khartoum seront surpris non seulement par les destructions de leurs maisons mais aussi par la disparition de la plupart des anciens et nouveaux repères de la ville.
Trésors nationaux en danger de disparaître
Le danger ne réside pas uniquement dans les bâtiments, mais aussi dans les trésors nationaux qui préservent la mémoire de la nation, comme les Archives Nationales au cœur de Khartoum, menacés par les flammes ou déjà anéantis. Ces archives font partie des plus anciennes institutions de préservation écrite de la région, conservant environ trente millions de documents regroupés en deux cents collections documentaires avec des cartes, des manuscrits et des livres rares. Cependant, cette importance ne semble pas concerner les milices Janjawid, prêtes à en faire un entrepôt d’armes comme elles l’ont fait avec le musée national.
Assécher les sources de vie
Alors que les destructions architecturales sont une conséquence habituelle des conflits, les impacts sur la ville peuvent être bien plus étendus que les bâtis. Aujourd’hui, nous assistons à l’effacement de tous les repères de l’ancienne Khartoum et à l’assèchement de ses sources de vie, menant à son effondrement. Ce qui se passe n’est pas simplement des dommages collatéraux, mais un objectif dissimulé : brûler tout, forçant les gens à fuir.
Entre Khartoum et Gaza
Les événements à Gaza reflètent ceux de Khartoum, avec des tentatives soutenues par les représentants de l’Occident colonial pour détruire les bâtiments et appliquer la politique de la terre brûlée, forçant les habitants à fuir ou à mourir. Plus d’un million de maisons ont été pillées, leurs contenus éparpillés avec les restes des humains décédés des bombardements, en plus des « morts des maisons », ce concept inventé par les géographes canadiens Porteous et Smith en 2001, des zones urbaines intentionnellement occupées telles des tactiques visant à nuire au moral des habitants et à les déplacer.