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IA crée 120 000 recettes pour capter le carbone
Imaginez chercher une nouvelle recette pour un délicieux gâteau, et au lieu de vous débrouiller seul, vous vous tournez vers un livre de cuisine magique capable de créer des milliers de recettes uniques avec différentes combinaisons d’ingrédients, de saveurs et de textures.
De même, des chercheurs du laboratoire Argonne, relevant du ministère américain de l’énergie, ont réussi, dans une étude publiée dans la revue « Communications Chemistry », à utiliser l’intelligence artificielle pour produire plus de 120 000 « recettes » nouvelles pour des matières candidates à la capture du carbone, connues sous le nom de « cadres organo-métalliques » ou « MOF », puis à utiliser l’apprentissage automatique pour réduire ce nombre de recettes à un nombre plus restreint susceptibles d’être plus efficaces.
4 avantages des matériaux MOF
Les matériaux MOF semblent être fortement prometteurs pour la capture du carbone, réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre des centrales électriques et d’autres installations industrielles. Cela pourrait être dû, théoriquement, à 4 avantages mentionnés par des études examinant l’utilisation de ces matériaux :
- Haute surface spécifique : ces matériaux ont une surface spécifique incroyablement élevée par rapport à leur volume, offrant ainsi une grande surface pour l’absorption de gaz comme le dioxyde de carbone.
- Taille des pores réglable : les chercheurs peuvent concevoir et synthétiser ces matériaux avec des tailles de pores spécifiques conçues pour capturer des molécules particulières, permettant une absorption sélective des gaz comme le CO2.
- La diversité chimique : ces matériaux peuvent être modifiés chimiquement pour améliorer leurs propriétés de capture du carbone, permettant une sélection plus ciblée du CO2 et une amélioration de la capacité d’absorption.
- Recyclabilité : les matériaux MOF peuvent souvent être renouvelés et réutilisés plusieurs fois sans grande perte de leur capacité d’absorption sélective du carbone, les rendant économiques et respectueux de l’environnement par rapport aux matériaux de capture du carbone à usage unique.
Trois unités de construction compliquent la tâche
Ces matériaux comportent trois types d’unités de construction dans leurs molécules :
- Les clusters métalliques : des particules ou des groupes d’ions métalliques qui agissent comme des connecteurs, liant la structure ensemble en utilisant différents métaux comme le zinc, le cuivre ou le chrome.
- Les liaisons organiques : des molécules composées de carbone, d’hydrogène et d’autres éléments qui relient les clusters métalliques.
- Les matériaux inorganiques : ce sont des unités de construction supplémentaires pouvant être intégrées dans certains cadres organo-métalliques, offrant une stabilité ou des performances fonctionnelles supplémentaires, comme d’autres types d’ions ou de groupes métalliques, voire des particules non métalliques comme l’oxygène ou l’azote.
4 voies de l’intelligence artificielle
À travers quatre voies différentes, l’étude décrit comment les chercheurs ont réussi à utiliser l’intelligence artificielle pour sélectionner les matériaux les plus efficaces :
- Intelligence artificielle générative : les chercheurs ont commencé par utiliser un programme informatique capable de générer de nouveaux ensembles d’éléments de base pour les MOF, produisant plus de 120 000 « recettes » nouvelles en seulement 30 minutes.
- Apprentissage automatique : les chercheurs ont utilisé l’apprentissage automatique pour analyser les données issues d’expériences passées et de simulations pour prédire les conceptions de MOF les plus efficaces pour la capture sélective du CO2 parmi les 120 000 recettes.
- Test à haute productivité : les chercheurs ont testé de nombreux candidats différents de MOF et en ont sélectionné 6 qui semblaient les plus efficaces, puis les ont soumis à plus de recherche.
- Simulation de dynamique moléculaire : enfin, les chercheurs ont utilisé la simulation par ordinateur pour étudier le comportement des atomes dans les meilleurs matériaux candidats et déterminer s’ils étaient capables de capturer efficacement le CO2.
Une perspective plus large.. 4 questions
Cette approche basée sur l’intelligence artificielle promet une matière MOF qui pourrait être efficace pour capturer le carbone, rentable, et facile à produire, comme l’a déclaré Eliott Huerta de l’Argonne, qui a aidé à diriger l’étude. Cependant, l’expert en science des matériaux à l’Université d’El Menia, Khaled Jadd, soulève 4 questions à aborder dans des études ultérieures pour s’assurer que les matériaux innovants créés par l’intelligence artificielle seront efficaces lors de leur passage à une application industrielle.
Jadd explique ces 4 questions comme suit :
- Extensibilité : comment augmenter la production des nouveaux matériaux MOF aux niveaux industriels et rendre le processus plus rentable? Cela nécessitera des études supplémentaires sur les techniques de synthèse des matériaux évolutifs et rentables et les méthodes de recyclage des matériaux utilisés.
- Stabilité et durabilité à long terme : comment les MOF fonctionnent-ils dans des conditions du monde réel sur de longues périodes ? Une étude de la stabilité et de la durabilité des matériaux à long terme dans des environnements variés, y compris des températures élevées, l’humidité et l’exposition à des produits chimiques, est essentielle pour évaluer leur viabilité pratique.
- Intégration dans les processus industriels : comment intégrer les MOF dans les processus industriels existants de capture du carbone de manière transparente ? La collaboration avec des partenaires industriels pour tester les technologies de capture du carbone basées sur les cadres organo-métalliques et évaluer leur compatibilité avec l’infrastructure industrielle est indispensable pour la mise en œuvre dans le monde réel.
- Impact environnemental : quelles sont les implications environnementales de la production, de l’utilisation et de l’élimination des MOF ? Une évaluation de l’empreinte environnementale des nouveaux MOF est nécessaire.
La progression continue des recherches dans ce domaine crucial de la capture du carbone offre des perspectives prometteuses pour un avenir plus écologique et durable.