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François Ier et le Sultan ottoman : une alliance inattendue
Au cours du XVIe siècle, l’Europe a été le théâtre d’un violent conflit pour la domination entre deux des plus grands dirigeants de l’époque, à savoir le roi français François Ier (décédé en 1547) et l’empereur romain « saint » et roi d’Espagne Charles Quint (décédé en 1558). Ce conflit a éclaté autour de l’Italie, un territoire fragmenté en plusieurs républiques riches, telles que Venise, Gênes, Florence et Milan, ainsi que par son importance religieuse en tant que siège de la papauté. Ces luttes sont connues sous le nom de guerres italiennes, qui ont duré près de soixante ans, entre 1494 et 1559. Ces guerres ont marqué un tournant dans l’histoire des relations internationales européennes et l’influence ottomane.
Le conflit pour les richesses d’Italie
La France aspirait à s’emparer de certaines parties de l’Italie, alors qu’Espagne et l’« empire romain » cherchaient à imposer leur domination sur ces régions. Charles Quint dirigeait un immense empire comprenant l’Espagne, les Pays-Bas, l’Autriche et des parties de l’Italie, lui conférant une puissance économique et militaire considérable. De son côté, François Ier souhaitait étendre l’influence française en Italie et rétablir le contrôle sur le duché de Milan, perdu au profit de l’empire espagnol.
Le conflit entre François Ier et Charles Quint débuta indirectement en 1515, lorsque les Français réussirent à prendre le contrôle de Milan, ce qui accéléra les hostilités. En 1521, soutenu par le pape, Charles Quint lança une attaque contre Milan, alors contrôlée par les Français. François Ier considérait cette agression comme une menace directe à ses intérêts, entraînant une riposte avec une tentative de reprise qui se solda par une défaite écrasante lors de la bataille de Pavi en 1522.
François Ier fait appel au Sultan
Aprés son retour en France en mars de la même année, François Ier refusa de se plier à la traite de Madrid, considérant qu’elle avait été obtenue sous contrainte. Cela conduisit à une escalade du conflit et à la recherche d’alliances nouvelles contre Charles Quint. C’est à ce moment que le sultan ottoman Soliman le Magnifique (décédé en 1566) était à la tête d’un empire en pleine expansion, avec Istanbul contrôlant de vastes territoires en Asie, en Afrique et en Europe.
Connaissant la puissance croissante de Charles Quint, François Ier réalisa que l’alliance avec le sultan ottoman pouvait être sa seule chance de contrer cette menace. Malgré une forte opposition religieuse entre la France catholique et l’Empire ottoman, les nécessités politiques poussèrent François Ier à envisager cette alliance improbable.
Une correspondance diplomatique
Alors qu’il était prisonnier, François Ier entama une correspondance avec Soliman le Magnifique, sollicitant son soutien contre Charles Quint. Dans ses lettres, il s’adressait au sultan comme le « Sultan du monde » et reconnaissait son autorité sur de vastes territoires. Il fit savoir qu’il ne voyait de possibilité d’aide qu’à travers l’Empire ottoman, exprimant une profonde détresse face à ses pertes.
En réponse, Soliman exprima sa sympathie et sa volonté de fournir soutien à François Ier. Les lettres entre les deux dirigeants mirent en avant l’importance du soutien ottoman face à l’invasion espagnole, soumettant les intérêts mutuels à un objectif commun.
Les campagnes militaires ottomanes
Dans le cadre de cette alliance, le sultan lança des offensives contre les possessions de Charles Quint, notamment lors de la célèbre bataille de Mohács en 1526 contre le royaume de Hongrie. Ce succès permit de redonner à François Ier un répit dans le cadre de ses stratégies militaires face à Charles Quint.
Les Ottomans ne se contentèrent pas de mener des offensives terrestres, mais élargirent également leur flotte dans la Méditerranée pour contrer les menaces espagnoles. Soliman nomma le célèbre corsaire, Hayreddin Barbarossa, à la tête de la flotte ottomane, renforçant ainsi la puissance maritime turque tout en soutenant la France dans sa lutte pour récupérer les territoires perdus.
La restauration des territoires français
En 1543, l’escadre ottomane, dirigée par Barbarossa, atteignit les côtes italiennes où plusieurs villes se rendirent, notamment Messine et Reggio. Leurs attaques se poursuivirent tout au long de l’été, avec des victoires qui renforcèrent non seulement la position de François Ier mais aussi l’importance stratégique de l’alliance entre la France et l’Empire ottoman.
Après la conquête de Nice, le port fut sous contrôle ottoman, illustrant le succès de cette alliance inattendue. Ce partenariat unique entre un roi chrétien et un sultan musulman marqua une période significative des relations entre les deux puissances, renforçant leur position face à un ennemi commun, Charles Quint.