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Les conséquences du changement climatique remettent en question notre approche de l’environnement. L’adaptation à l’erosion croissante du littoral impose non seulement des modifications méthodologiques, mais aussi un questionnement sociétal profond.
Un constat alarmant
En tant que maire de Le Pouliguen, la commune de Loire-Atlantique la plus touchée par l’érosion, il est essentiel de reconnaître que *« la mer avance, les terres reculent »*. Cette réalité s’accompagne d’une augmentation des éboulements de falaises. Les événements climatiques récents laissent présager des reculs encore plus importants dans les décennies à venir. Pour s’adapter, il est indispensable d’anticiper et de mettre en place des politiques publiques qui dépassent le cadre des mandats électoraux actuels.
Une stratégie locale pour le littoral
Les deux intercommunalités réunissant environ vingt communes et 141 kilomètres de côtes travaillent actuellement sur une stratégie locale de gestion intégrée du trait de côte (SLGITC) à l’horizon 2050 et 2120. Ce projet est né d’un appel à projets du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) et de l’Association nationale des élus des littoraux (Anel). Cette démarche repose sur un diagnostic des enjeux, en tenant compte des aspects liés à l’habitat, aux infrastructures, au tourisme et à la biodiversité.
Les défis de l’adaptation
Face à l’érosion, la question des orientations stratégiques se pose : que devons-nous protéger et jusqu’où ? Construire des ouvrages de défense pour quelques habitations là où la collectivité ne pourra pas investir ni entretenir ces infrastructures, en raison de leur érosion constante, n’a pas de sens. De plus, la multiplication de ces constructions peut déporter l’érosion, aggravant ainsi le problème actuel.
Une autre solution consiste à limiter les enjeux ou à les relocaliser, en pesant le coût et les avantages. Il est crucial de décider de protéger, de renoncer ou de relocaliser, en fonction de ces critères.
Une approche écosystémique nécessaire
Une conviction forte émerge : il est essentiel d’adopter une approche transversale des questions environnementales. Anticiper l’érosion nécessite de relier ce phénomène à la capacité d’accueil du territoire, à la stratégie foncière, ainsi qu’à celle de la biodiversité. L’évaluation de la solution retenue pour gérer l’érosion côtière dépendra de trois facteurs : la vision politique, le financement disponible et la capacité de résilience des habitants face aux enjeux climatiques.
Freiner l’anthropisation du littoral
Limiter les enjeux implique également de freiner l’anthropisation du littoral, par exemple en interdisant la construction dans certaines zones à risque, définies scientifiquement. Cependant, il est difficile d’expliquer une politique foncière à mettre en place aujourd’hui pour un risque qui pourrait se matérialiser dans cinquante ans. Une politique limitée aux seuls déplacements d’infrastructures publiques, sans indemnisation pour les habitants côtiers, pourrait engendrer des coûts élevés, estimés à 188 millions d’euros d’ici 2120 pour notre commune, ce qui soulève des questions sur la faisabilité de cette stratégie.
Réflexions sur nos rapports au temps et au risque
La mise en œuvre de cette stratégie doit également s’accompagner d’une réflexion sur notre rapport au temps et au risque. Entre l’action immédiate et le danger progressif de l’érosion, il est crucial d’évaluer notre rapport à la science et à l’incertitude. Comment trouver un équilibre entre la préservation et l’acceptation des conséquences du changement climatique ?
Un choix difficile
La véritable question qui se pose entre les élus et les citoyens est : avons-nous encore le choix ? Face aux conséquences du changement climatique, certaines voix s’élèvent contre sa réalité. Les élus locaux devront faire preuve de courage et apprendre à « vivre avec » l’évolution du littoral, plutôt que de « lutter contre ». Cette approche pragmatique pourrait s’avérer essentielle pour l’avenir de nos côtes.