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Crise politique en Nouvelle-Calédonie : un débat figé entre indépendantistes et non-indépendantistes
La situation politique en Nouvelle-Calédonie est marquée par une stagnation persistante, malgré des améliorations sur le plan de la sécurité. Le mardi 24 septembre, jour commémorant la « prise de possession » de l’île par la France, pourrait cependant plonger le territoire dans une zone de turbulence. Cette date, reconnue comme la « Fête de la citoyenneté », revêt une signification forte pour les Kanaks, qui ont annoncé leur intention d’autoproclamer l’indépendance de l’archipel pour le 24 septembre 2024.
Des visions politiques divergentes
« Politiquement, rien n’est réglé », déclare Sylvain Brouard, directeur de recherche à Sciences Po et spécialiste des questions calédoniennes. Il met en lumière l’absence de discussions constructives entre indépendantistes et non-indépendantistes, soulignant que chacun des deux camps est lui-même fracturé. « Les indépendantistes sont en désaccord entre eux, tandis que les non-indépendantistes affichent des visions très variées », précise-t-il.
D’un côté, Sonia Backès, présidente (Renaissance) de la province Sud, et le député Nicolas Metzdorf prônent un découpage territorial, séparant le sud de l’île principale Grande-Terre, bastion des non-Kanaks, de la province Nord et des îles, majoritairement habitées par des Kanaks. Toutefois, le marché de l’emploi est principalement concentré autour du Grand Nouméa, au sud de Grande-Terre, où la population kanak continue d’augmenter. À l’inverse, le parti Calédonie Ensemble (Horizons) adopte une approche plus consensuelle, plaidant pour une autonomie renforcée avec plus de compétences sur le territoire.
Les fractures au sein des indépendantistes
Les Kanaks ne sont pas exemptés de divisions. Au sein de leur mouvement, la tendance radicale, représentée par la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), insiste sur une indépendance totale et intensifie les actions de terrain pour asseoir son autorité. En opposition, le Parti de libération kanak (Palika) se positionne sur une ligne plus modérée, appelant à la cessation des blocages et à la violence, tout en réclamant une indépendance associée à la France sur certaines compétences essentielles.
Cette polarisation crée une atmosphère tendue. Les leaders indépendantistes modérés expriment des craintes pour leur sécurité face à la radicalisation croissante parmi certains militants. Actuellement, il semble impossible de réunir toutes les parties autour d’une table de négociations. De surcroît, l’Union calédonienne refuse de dialoguer sinon avec l’État, en se concentrant uniquement sur le transfert de souveraineté prévu pour le 24 septembre 2025. Sylvain Brouard souligne qu’indépendantistes et non-indépendantistes partagent au moins un point commun : l’urgence d’un soutien financier de l’État pour la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie. Cependant, un accord politique reste essentiel avant d’envisager cette reconstruction.
Vers une solution durable ?
Afin de sortir de cette impasse, Sylvain Brouard appelle à un « mouvement d’ampleur ». « Il est crucial d’écouter, de comprendre et de respecter chaque étape du processus, même celles qui semblent sans importance », préconise-t-il. Parmi les opportunités d’apaisement, la personnalité de Michel Barnier pourrait jouer un rôle clé, tout comme celle d’Emmanuel Tjibaou, premier député indépendantiste depuis 1986, qui pourrait émerger comme un leader rassembleur.
Les élections provinciales, programmées d’ici le 15 décembre 2024, auront pour tâche de renouveler les assemblées des trois provinces, dont dépendra ensuite la formation du gouvernement local. Cependant, au regard de la crise actuelle, leur tenue pourrait être reportée à 2025.