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Comités de vigilance pour contrer la violence des colons en Cisjordanie
Depuis 3 ans, le Palestinien Awad Abu Samra et ses compagnons activent au sein du « Comité de surveillance de Turmus’Aya », nommé d’après leur village près de la ville de Ramallah, au centre de la Cisjordanie. Ils se déplacent à moto entre les montagnes escarpées et les plaines, surveillant les mouvements des colons et les dangers potentiels pour la ville afin de les déjouer.
Au cours des derniers mois, les colons ont recouru à diverses formes de violence, passant de la destruction d’arbres et de récoltes agricoles au vol de biens, puis au meurtre direct. Cette escalade a contraint les Palestiniens à surveiller et repousser ces agressions, popularisant ainsi les « Comités de surveillance » devenus une phénomène répandu dans les villages palestiniens, notamment au nord de la Cisjordanie.
La seule arme des volontaires
Awad Abu Samra (58 ans) et les volontaires comme lui possèdent une seule arme : un téléphone portable relié directement aux haut-parleurs des mosquées de leur village de Turmus’Aya. Ils utilisent cet outil pour émettre des avertissements en cas de suspicion de menace provenant des colons.
Dans une interview accordée à Al Jazeera Net, un habitant a évoqué la lutte continue des habitants contre les colons en comparant leur action à une ruche d’abeilles, où chacun complète l’autre, que ce soit les comités de surveillance ou les citoyens volontaires.
Il a rappelé qu’il y a deux semaines, des colons se sont infiltrés dans la zone orientale, ont incendié des serres en plastique et ont attaqué les habitants qui tentaient d’éteindre le feu. Ces événements ont ravivé le souvenir d’un épisode particulièrement brutal pour le village, en juin 2023, lorsque les colons ont tué un civil et incendié plus de 30 maisons et des dizaines de véhicules.
Devoir des habitants du village
Non loin de Turmus’Aya, le village d’Al Mughayyir fait également face aux attaques des colons, mobilisant des comités de surveillance formés depuis 2019. Ils utilisent les réseaux sociaux pour se préparer à toute agression à tout moment.
Le chef du conseil du village, Amin Abu Aliya, a déclaré à Al Jazeera Net qu’ils sont constamment prêts à surveiller tout événement ou danger, et qu’à la moindre alerte, ils diffusent des messages écrits et vocaux, puis se mobilisent ensemble pour repousser l’attaque.
Les habitants d’Al Mughayyir ont acquis une expérience sur les modes opératoires de l’armée israélienne et des colons, devenant souvent efficaces pour repousser leurs attaques récurrentes.
La confrontation et le sacrifice sont nécessaires
La violence des colons a poussé des entités comme l’Autorité de résistance au mur et aux colonies (semiofficielle) à organiser une conférence internationale pour protéger les citoyens contre les exactions des colons. Parallèlement, les factions nationales à Naplouse ont lancé un programme pour renforcer les comités de surveillance par le biais de rencontres avec les habitants.
Pour faire face à leur escalade, le coordinateur des activités populaires de l’Autorité de résistance au mur et aux colonies, Abdullah Abu Rahma, estime -sur la base de leurs expériences précédentes- que la situation exige maintenant l’intervention d’éléments internationaux et de solidaires étrangers pour soutenir les citoyens, documenter les attaques des colons en vue de les traduire en justice et de dénoncer leurs pratiques à l’échelle mondiale.
Abu Rahma affirme que « par un travail collectif et uni, les Palestiniens peuvent se défendre, grâce à un effort cumulatif impliquant toute la population palestinienne, afin de passer d’une phase de défense à une contre-attaque contre les groupes de colons qui les menacent ».
Face à l’armement accéléré des colons et à leur protection par l’armée et le gouvernement israéliens, Abu Rahma souligne que les Palestiniens ont perdu tout sentiment de sécurité, incapable de se protéger ou de défendre leur terre et à peine capables de documenter les attaques de colonies. Il ajoute que « les colons ont placé les Palestiniens devant un choix cornélien : la mort ou l’arrestation aux mains de l’armée et de la police israéliennes ».
De son côté, l’Autorité de résistance au mur et aux colonies a documenté environ deux mille attaques perpétrées par les colons contre les Palestiniens depuis le 7 octobre de l’année dernière, entraînant la mort de 17 personnes.
Conformément aux statistiques du ministère de la sécurité israélien, les colons ont obtenu 130 000 permis de port d’arme sur 320 000 demandes déposées.