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Rénovation d’une école coranique en centre d’art moderne à Tachkent
Un projet de rénovation unique dans la capitale ouzbèke, Tachkent, vise à transformer une école islamique historique en un espace créatif et une plateforme pour les arts modernes.
Ce projet, intitulé « Centre pour l’art contemporain » (CCA), représente un espace culturel distinct situé au cœur de Tachkent. Autrefois utilisé pour la menuiserie durant l’ère soviétique, il accueillera également cette année un programme de « résidence internationale » pour les artistes.
Une transformation réfléchie
Les pièces, qui étaient à l’origine conçues pour loger des élèves mémorisant le Coran, sont en cours de transformation en espaces fonctionnels et confortables pour les artistes. Parallèlement, des travaux se poursuivent sur une ancienne mosquée sur le site, qui servira d’espace de réunion. Ce projet est développé sous l’égide de la Fondation pour le développement de l’art et de la culture en Ouzbékistan (ACDF).
Selon Azmal Mivani, architecte et PDG des services culturels de la Fondation Aga Khan, « durant le 20ème siècle, le bâtiment a été utilisé à diverses fins, y compris comme atelier de menuiserie. La première chose que nous avons faite a été d’examiner le toit, car dans ces bâtiments, il est souvent endommagé, ce qui permet des fuites d’eau et cause des dommages dans d’autres zones. »
Préserver l’héritage historique
Le personnel de la Fondation Aga Khan, qui a mené des projets similaires en Afghanistan, s’efforce de préserver autant que possible la structure historique et de la réutiliser.
La petite mosquée sur le site disposait de deux zones de prière : une intérieure pour l’hiver et une extérieure pour l’été. L’intérieur a été largement détruit durant l’ère soviétique pour faire place à une porte. L’original mihrab de la mosquée, bien qu’entouré de briques à l’époque soviétique, a été redécouvert par l’équipe.
Le projet inclut également la restauration de l’iwân traditionnel, et le centre comprendra un café et une salle d’exposition.
Une école coranique au cœur de Tachkent
L’école islamique, ou madrasa, a été construite dans les années 1880 dans l’un des anciens quartiers de Tachkent. Il y a une décennie, le diplomate américain Eugene Schiller a été le premier responsable américain à visiter Tachkent, comparant cette ville frontalière élégante à Denver (dans le Colorado) et observant les Ouzbeks à travers un prisme colonial.
Après la Révolution d’Octobre de 1917, toutes les formes de religion ont été strictement réprimées, conformément aux idéologies socialistes. Néanmoins, certaines expressions religieuses ont fini par s’immiscer dans la vie soviétique durant la Seconde Guerre mondiale.
La renaissance culturelle
Le projet de rénovation s’inscrit dans un contexte où beaucoup du patrimoine architectural islamique en Ouzbékistan a été détruit. À Boukhara, l’Union soviétique a démoli les anciennes murailles de la ville et de nombreux autres bâtiments historiques. Aujourd’hui, seulement 30 % du noyau historique de la vieille ville subsiste.
Le « Biennale de Boukhara » se prépare à utiliser certaines des structures islamiques restantes pour des événements culturels contemporains, marquant un renouveau artistique.
Collaboration internationale
Le « Biennale de Boukhara » s’inspirera d’autres biennales mondiales, telles que celles de Venise, en utilisant des structures historiques pour exposer l’art contemporain. Jane Oumirova, présidente de la Fondation pour le développement de l’art et de la culture en Ouzbékistan, a déclaré : « La vision de la fondation est de redonner vie à ces structures historiques. Celles-ci étaient dans un état très dégradé. Une partie de notre travail consiste à restaurer, et l’autre à éduquer et construire des capacités conformément aux pratiques internationales. »
Un avenir prometteur
Simultanément, Samarcande se prépare à devenir l’une des « capitale de la culture » de l’Organisation de la coopération islamique en 2025. À proximité du Centre pour l’art contemporain de Tachkent, un grand centre pour la civilisation islamique sera inauguré l’année prochaine, comprenant un musée et un centre de recherche. Ce centre ambitieux comptera 200 000 manuscrits et disposera d’un théâtre de 500 places.
Oumirova a ajouté : « Nous sommes un pays laïque, mais au cours des 30 dernières années, selon la vision du gouvernement, de nouvelles mosquées et écoles ont été créées. Ces projets visent à revitaliser les espaces culturels. La préservation et l’innovation vont de pair. »
Une tradition vivante
Les techniques de construction traditionnelles, qui ont disparu en Afghanistan et ailleurs en Asie centrale, prospèrent encore en Ouzbékistan. Par exemple, la tradition de fabrication de briques demi-briques pour les dômes et les arcs demeure active.
Alisher Rahimov, un artiste céramiste, représente certaines des traditions de l’art islamique qui fleurissent en Ouzbékistan. Il est le septième de sa famille à transformer l’argile en œuvres d’art et fait partie du conseil qui sélectionnera le premier groupe d’artistes en résidence dans le nouveau centre culturel à Tachkent.
Le jury de sélection reflète les ambitions internationales du centre, incluant des membres tels que l’intellectuel saoudien Ahmed Anjwy, Carla Sodi de la Fondation Casa Wabi au Mexique, le curateur japonais Eiko Yokoyama, et la mécène française du design Pascale Sigrist-Moussard. Deux représentants des États-Unis font également partie du jury : l’ingénieur et designer américain Ronald Rael, et le critique d’art et écrivain basé à Brooklyn, Glenn Adamson.
Rahimov a déclaré : « Ce que j’apprécie dans ce projet, c’est l’interaction entre le traditionnel et le nouveau. Entre l’étranger et le local. Vous avez des artistes internationaux, un quartier résidentiel à proximité, une école et un centre des arts islamiques. Les gens vivent ici, et maintenant ils vont créer ici. J’adore ça. Il y aura une nouvelle vie au sein de ce quartier. »