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Pression émotionnelle et psychologique : le médecin décrit Gaza
Le Dr Mohammed Abou Mghayzeib, vice-coordinateur médical pour Médecins Sans Frontières, a travaillé dans plusieurs régions palestiniennes, notamment à Naplouse, en Cisjordanie, à Jérusalem, et à Gaza, où il s’est installé pendant 20 ans. Cette période a été marquée par des conflits successifs.
Depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023, lui et sa famille ont dû fuir plusieurs fois, une expérience inédite pour eux. Après plusieurs déplacements, ils ont finalement réussi à se rendre en Égypte, tandis que le Dr Abou Mghayzeib est resté pour continuer sa mission médicale dans le secteur.
Les défis quotidiens des médecins
Au cours d’une interview avec Nasrine Malak du Guardian, le Dr Abou Mghayzeib a partagé son expérience en tant que médecin et Palestinien confronté aux horreurs de la guerre. Il a décrit la nature des blessures observées quotidiennement dans les hôpitaux, avec un afflux constant de cas critiques, en particulier des blessures abdominales et aux membres inférieurs.
Il a noté qu’environ 60 % des blessés sont des enfants et des femmes. Une histoire marquante mentionnée par le médecin concernait une jeune femme enceinte d’une vingtaine d’années, qui est arrivée à l’hôpital après que son domicile a été bombardé. Son mari et ses enfants ont perdu la vie, elle a subi une amputation de la jambe et a perdu son bébé.
Les membres de l’équipe médicale font face à un choc émotionnel intense face à de telles tragédies. Le Dr Abou Mghayzeib a exprimé que, bien qu’ils s’efforcent de se consoler en pensant à la sécurité de leurs propres familles, la vue d’enfants amputés ou d’individus ayant perdu l’ensemble de leur famille est extrêmement difficile à gérer, tant sur le plan émotionnel que psychologique.
L’effondrement du système de santé
Les remarques du Dr Abou Mghayzeib illustrent l’effondrement du secteur de la santé à Gaza, exacerbé par les bombardements israéliens constants. Il a signalé que Médecins Sans Frontières n’a pas reçu de fournitures médicales depuis le début de l’invasion de Rafah au mois de mai. Si des camions d’aide ne peuvent pas entrer, l’organisation sera contrainte de réduire ses activités.
Il a également évoqué les défis rencontrés par les médecins sur le terrain, en raison des frappes israéliennes visant les hôpitaux et des ordres d’évacuation réguliers. Un hôpital de campagne ouvert à Rafah en décembre dernier, pouvant accueillir 60 patients, a dû être fermé en mai à cause des conflits.
Des circonstances similaires ont conduit l’organisation à évacuer un hôpital à Khan Younès en février et le célèbre hôpital Al-Chifa en avril. Les activités de l’organisation se limitent désormais à Khan Younès, où se trouvent l’hôpital Nasser et une autre clinique, tout en reprenant partiellement certaines activités dans le nord de Gaza.
Conflit et déplacement constant
La situation instable dans laquelle se trouve le Dr Abou Mghayzeib reflète également les luttes de sa famille au cours des premiers mois de la guerre. Comme de nombreux habitants de Gaza, ils ont dû fuir à plusieurs reprises, cherchant refuge dans des « zones sûres » qui sont souvent finalement bombardées, laissant derrière eux « tout, leur maison et leurs souvenirs », comme il l’a exprimé.
En soulignant la souffrance des Palestiniens, le Dr Abou Mghayzeib a commenté : « Les experts en santé mentale du monde entier doivent inventer un nouveau terme pour décrire la souffrance des habitants de Gaza. Nous souffrons d’un mélange de peur, de stress post-traumatique, d’anxiété et de dépression. »