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Courir à jeun : avantages et précautions selon les experts
C’est une question qui divise les coureurs : est-il préférable de se lever tôt pour courir à jeun ou de prendre son temps et de petit-déjeuner avant de chausser ses baskets ? Nous faisons le point avec Mathieu Jouys, diététicien nutritionniste au sein de la cellule optimisation de la performance de la Fédération Française d’Athlétisme.
Courir à jeun : en quoi ça consiste ?
Vous l’aurez deviné, courir à jeun consiste à courir le ventre vide ! Cela implique généralement de se lever assez tôt pour courir avant de petit-déjeuner alors même que nous n’avons rien mangé depuis 10 à 14 heures (depuis le dîner de la veille, en somme).
Cette idée vous paraît totalement aberrante ? Et pourtant… De plus en plus de sportifs profitent de cette fenêtre matinale pour booster leur métabolisme et se dépenser avant de commencer leur journée de travail. Essayons de comprendre pourquoi.
Avantages et inconvénients : est-ce bien raisonnable de faire un footing à jeun ?
Avant toute chose, rappelons que rien ne vous oblige à vous lever aux aurores pour aller courir. « À chacun ses choix : certaines personnes préfèrent courir le matin pour des raisons de santé, de style de vie ou d’objectifs fitness. L’essentiel est de respecter des besoins et ses envies », note Mathieu Jouys.
Les bienfaits de la course à jeun
- Favoriser l’utilisation des graisses comme source d’énergie : « En l’absence de réserves de glycogène disponibles immédiatement, le corps est plus enclin à puiser dans ses réserves de graisses, ce qui peut favoriser la perte de poids sur le long terme », indique l’expert.
- Adaptation métabolique : courir à jeun peut aider le corps à s’adapter à l’utilisation des graisses comme source d’énergie, ce qui peut être avantageux pour les personnes qui travaillent en endurance et celles qui cherchent à améliorer leur capacité à brûler des graisses.
- Renforcement de la résilience et de la détermination : courir à jeun nécessite aussi une certaine discipline mentale.
- Gain de temps : on évite d’attendre quelques heures après avoir petit-déjeuner avant d’aller courir et on ne repousse pas l’exercice au dernier moment à cause d’un changement de planning.
Cela dit, n’hésitez pas à demander conseil à un professionnel de santé ou à un coach sportif avant de commencer à courir à jeun ! Ce dernier pourra s’assurer que ce type d’entraînement convient à votre niveau et à votre forme physique.
Perte de poids : la course à jeun permet-elle vraiment de maigrir ?
Comme indiqué ci-dessus, la course à jeun peut contribuer à favoriser la perte de poids, mais ce n’est pas nécessairement une méthode miracle pour maigrir ! Et Mathieu Jouys d’expliquer à nouveau : « Lorsque l’on pratique une activité physique à jeun, nos réserves de glycogène (les glucides stockés dans le foie et dans les muscles) sont si basses que notre organisme est obligé de puiser de l’énergie dans nos réserves de graisse. ».
Pour rappel, seul un déficit calorique permet de perdre du poids (dépenser plus de calories qu’on en consomme). La course à jeun est donc intéressante dans la mesure où elle augmente la combustion des graisses. Mais elle renforce aussi nos muscles et booste notre métabolisme, ce qui favorise la combustion de calories au quotidien en dehors de toute activité sportive.
Il est important de rappeler que la perte de poids ne dépend pas uniquement de l’activité physique, mais aussi de la génétique, de l’alimentation, de l’état de santé et des habitudes de vie de chacun. « Autrement dit, si vous allez courir à jeun un jour sur trois, mais que vous ne prêtez aucune attention à votre alimentation, il est possible que votre poids stagne », prévient le diététicien nutritionniste.
Cette pratique sportive comporte aussi son lot d’inconvénients !
La course à jeun n’est pas faite pour tout le monde… Chez certains coureurs, l’absence de glycogène provenant de la nourriture consommée avant l’exercice peut parfois entraîner une baisse de performance : diminution de la force, de l’endurance et de la vitesse pendant la course.
Courir à jeun lorsque l’on débute la course à pied peut aussi augmenter le risque de fatigue prématurée pendant l’exercice, ce qui peut entraîner une diminution de la motivation… Une faible disponibilité de glucose peut également affecter la fonction cognitive et compromettre la concentration et la coordination pendant la course (ce qui augmente le risque de blessure).
Enfin, la course à jeun peut exacerber la sensation de faim pendant et après l’exercice. Cette sensation peut être à l’origine d’une surcompensation alimentaire après l’entraînement – autrement dit des fringales ! Certaines personnes sont en effet tentées de consommer davantage de calories pour compenser l’énergie dépensée pendant la course… Un comportement contre-productif dans une optique de perte de poids.
La course à jeun, une pratique réservée aux coureurs expérimentés !
« La course à jeun n’est pas une mauvaise pratique, mais elle est réservée aux coureurs expérimentés et suffisamment entraînés. J’entends par là des personnes qui courent déjà deux à trois fois par semaine depuis un certain temps », insiste Mathieu Jouys. Et de préciser : « L’organisme des coureurs doit être suffisamment aguerri pour pouvoir s’adapter sur le plan physiologique et continuer à fonctionner sans apport glucidique préalable ». Dans le cas contraire, les coureurs se retrouvent rapidement en hypoglycémie et interrompent brutalement leur course. Au programme ? Étourdissements, faiblesse musculaire, sensation de malaise… D’où l’importance de procéder par étapes !
Mode d’emploi : combien de temps peut-on courir à jeun ? Et à quel rythme ?
Courir à jeun, oui, mais pas n’importe comment. « Pour limiter les risques, mieux vaut adapter l’effort à ses capacités », conseille Mathieu Jouys. Pour ce qui est du rythme de course, l’idéal est de courir à un rythme modéré, voire faible. « Il faut courir en endurance fondamentale, c’est-à-dire à une allure qui permet de courir tout en maintenant une conversation sans être essoufflé(e) à tout bout de champ », précise-t-il.
Pour ce qui est du timing, il est généralement recommandé de courir minimum trente minutes, de façon à ce que l’organisme soit en capacité de mobiliser ses réserves de graisse. Commencez par des séances courtes et augmentez progressivement leur durée au fur et à mesure que votre corps s’adapte. Certaines personnes expérimentées peuvent courir à jeun pendant plus d’une heure, mais il est important de rester à l’écoute de votre corps et de ne pas chercher à dépasser vos limites à jeun.
Enfin, pas question de courir à jeun tous les matins – surtout si on est novice ! Allez-y progressivement et ajustez en fonction de votre tolérance en misant sur trois à quatre sessions maximum par semaine, même si vous êtes expérimenté(e), recommande Mathieu Jouys.
Matin ou soir : quel est le meilleur moment pour faire un footing à jeun ?
Le meilleur moment pour faire un footing peut varier en fonction des préférences personnelles, du style de vie et des objectifs individuels. Mais lorsqu’il est question de faire un footing à jeun… Mieux vaut privilégier le matin pour des raisons de praticité étant donné que c’est pendant la nuit qu’on reste le plus longtemps sans manger. Cela dit, si vous n’êtes pas du matin, vous pouvez tout à fait petit-déjeuner, jeuner pendant une dizaine d’heures puis aller courir !
Quelles précautions prendre pour courir à jeun sans risques au réveil ?
- Consultez votre médecin : pour vérifier l’absence de contre-indications et bénéficier de conseils personnalisés.
- Attendez d’être bien réveillé(e)s : ne partez pas courir au saut du lit et n’oubliez pas de vous échauffer pour déverrouiller votre corps.
- Hydratez-vous : avant, pendant et après l’effort ! « Courir à jeun ne veut pas dire courir déshydraté(e) », souligne Mathieu Jouys qui conseille même de boire une tasse de café ou de thé dans la mesure où la caféine pourrait favoriser l’utilisation du tissu adipeux à des fins énergétiques.
- Allez-y progressivement : ne dépassez pas 30 à 45 minutes d’entraînement si vous êtes débutant et tendez progressivement vers 1h, voire 1h30.
- Emportez toujours un encas : idéalement une compote à boire ou une barre de céréales, mais un morceau de sucre ou une boisson énergisante feront aussi bien l’affaire !
- Soyez attentif aux signaux de votre corps : si vous ressentez des étourdissements, des vertiges, une faiblesse ou toute autre sensation inhabituelle, arrêtez-vous et prenez le temps de récupérer.
- Assurez votre sécurité : si vous courez à l’aube ou au lever du soleil, assurez-vous d’être visible par les autres usagers de la route : n’hésitez pas à porter des vêtements de course réfléchissants ou de couleur vive et à utiliser des dispositifs d’éclairage si nécessaire.
- Étirez-vous après la course : prenez le temps de vous étirer pour détendre vos muscles et favoriser la récupération. Assurez-vous également de bien manger pour refaire le plein de glycogène et faciliter la récupération.