Le 15 avril, exactement un an après le début des troubles, une conférence de haut niveau sur le Soudan se tiendra à Paris. Organisée par la France, l’Allemagne et l’Union européenne, elle offre une opportunité vitale de recentrer l’attention internationale sur cette crise oubliée. Les dirigeants mondiaux doivent en profiter.
La violence a fait des milliers de morts, déplacé des millions de personnes et déclenché une catastrophe humanitaire qui menace d’exporter l’instabilité dans cette région d’Afrique. L’implosion du Soudan s’ajoute aux insurrections qui secouent les pays voisins du Sahel, risquant de marquer le continent avec une zone d’instabilité s’étendant de l’Atlantique à la mer Rouge.
Les attaques atroces contre les civils sont la marque alarmante de ce conflit. Cela inclut des tueries indiscriminées et motivées ethniquement au Darfour et des violences sexuelles généralisées contre les femmes et les filles. La faim sévit également. Ensemble, ces facteurs ont provoqué la crise de déplacement à la croissance la plus rapide au monde, et le plus grand déplacement d’enfants, à une vitesse et une échelle stupéfiantes.
En moins d’un an, 8,5 millions de personnes ont été contraintes de quitter leur foyer, et de plus en plus de personnes sont en mouvement à mesure que les conditions empirent. Près de deux millions ont fui à l’étranger, la plupart d’entre eux au Tchad, au Soudan du Sud et en Égypte, pour échapper au bain de sang. Plus de la moitié de ceux qui cherchent refuge sont des enfants. Les pays voisins ont tendu la main à des personnes dans le besoin désespéré, mais certains commencent déjà à craquer sous le poids de leurs propres urgences humanitaires.
Il existe également un risque sérieux que la région puisse bientôt devenir la plus grande crise de la faim au monde. Au Soudan, où les prix alimentaires ont augmenté de plus de 110 pour cent en février, près de 18 millions de personnes souffrent de faim aiguë, tandis que près de sept millions au Soudan du Sud et trois millions au Tchad courent le même sort – soit près de 28 millions de personnes au total.
Au sein du Soudan, la famine est désormais une possibilité réelle et dangereuse dans les mois à venir. Un nombre significatif de personnes connaissent des niveaux d’insécurité alimentaire d’urgence – en effet, ils sont à un pas de la famine – mais 90 pour cent d’entre eux sont piégés dans des zones largement inaccessibles aux agences humanitaires. Cela inclut les points chauds des conflits tels que Khartoum, l’État de Gezira, les Kordofans et les États du Darfour.
Les enfants du Soudan ressentent le plus cruellement les impacts de cette guerre. Fatima, six ans, par exemple, déplacée deux fois, tout d’abord en fuyant les combats à Khartoum avec sa famille, puis de Gezira à Kassala, aspire à rentrer chez elle, à l’école et à la paix. Elle fait partie des près de cinq millions d’enfants déplacés, et des 19 millions qui n’ont pas accès à l’éducation car les écoles ont fermé, les salaires des enseignants ne sont pas payés et les budgets de fonctionnement des écoles font défaut. Les conséquences de ces avenirs brisés se feront sentir pendant une génération.
La communauté internationale doit agir maintenant pour éviter la catastrophe régionale imminente
Tout d’abord, il doit y avoir un effort coordonné pour garantir un accès humanitaire sans entraves et assurer la protection des civils au Soudan. Cela inclut les groupes de volontaires locaux et les organisations de femmes qui soutiennent les survivantes de violences sexuelles, qui sont elles-mêmes prises pour cible.
Malgré la récente résolution du Conseil de sécurité des Nations unies appelant à un accès humanitaire sans entraves, aucun progrès significatif n’a encore été observé sur le terrain. Les opérations de livraison de fournitures d’aide aux populations dans le besoin – à travers les frontières et les lignes de front – continuent de se heurter à des obstacles. Pendant ce temps, les fournitures et équipes humanitaires sont sujettes au pillage et aux attaques.
Nous avons besoin que toutes les parties garantissent un accès sans entraves, et que tous les points de passage frontaliers soient ouverts, en particulier ceux menant aux Darfours et aux Kordofans. Créer l’espace nécessaire pour que les agences d’aide opèrent efficacement est maintenant un impératif humanitaire urgent.
Ensuite, la crise en spirale exige une réponse d’urgence convenablement financée. Malgré les besoins massifs, l’appel humanitaire conjoint de 2,7 milliards de dollars pour le Soudan, visant à fournir un soutien vital à près de 15 millions de personnes, n’est financé qu’à 6 pour cent.
Des ressources supplémentaires sont tout aussi vitales pour venir en aide aux réfugiés et aux rapatriés se trouvant actuellement dans les pays voisins. Au Soudan du Sud, le manque de fonds signifie que trois millions de personnes en état de famine aiguë ne reçoivent actuellement aucune aide alimentaire. Pendant ce temps, au Tchad, seule une injection d’argent urgente empêchera les 1,2 million de réfugiés du pays et près de trois millions de Tchadiens de perdre leurs rations plus tard ce mois-ci.
Il s’agit de personnes désespérément vulnérables ayant besoin de soutien et de protection internationaux auxquelles nos équipes peuvent accéder, mais qu’elles ne peuvent plus se permettre d’assister. Si ces coupes sont autorisées, l’augmentation prévisible de la faim ne fera qu’aggraver les souffrances de ceux qui ont déjà tant perdu, et accélérer la descente de la région dans l’instabilité et le chaos.
Le résultat prévisible du sous-financement continu dans les pays d’accueil en première ligne est que plus de personnes se sentiront contraintes de se déplacer – y compris en tentant des traversées dangereuses à travers la Méditerranée.
Enfin, et fondamentalement, cette crise oubliée nécessite des solutions politiques durables pour mettre fin aux affrontements qui déchirent le Soudan et déstabilisent ses voisins.
La conférence de Paris est une opportunité critique pour lancer une nouvelle initiative diplomatique visant à mettre fin à la violence, à éviter la famine et à rétablir l’équilibre fragile de la région élargie. Nous exhortons la communauté internationale à ne pas laisser passer cette chance.
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